Homage to Paderewski (Boosey & Hawkes, 1942)
Hyperion CDA67903

Jonathan Plowright (piano)
November 2011
75:32
  1 Józef Wieniawski (1837-1912) : Étude Op 44 No 22 [2'50]
Józef Wieniawski était moins connu que son frère aîné Henryk, illustre violoniste-compositeur. Né comme lui à Lublin, il étudia à Paris, où il remporta le premier prix de piano au Conservatoire en 1849, à l’âge de douze ans. Il s’installa ensuite à Varsovie, dont il devint le deuxième directeur de la Société musicale; vers la fin de sa vie, il emménagea à Bruxelles pour enseigner au Conservatoire. De sa musique, l’un de ses contemporains dit qu’elle était ensemble «pleine d’idées originales» et «sèche et pensive». Son Étude op. 44 no22 est virtuose et chopinesque.
  2 Ernest Schelling (1876-1939) : Nocturne 'Ragusa' [6'57]
  Béla Bartók (1881-1945) : Three Hungarian Folk-Tunes Sz66
  3 No 1: Andante tranquillo, rubato [0'53]
  4 No 2: Allegro non troppo, un poco rubato [1'02]
  5 No 3: Maestoso [1'20]
  Le volume Boosey & Hawkes s’ouvre sur les Trois airs folkloriques hongrois Sz66 (BB80b) de Béla Bartók, composés en 1914–18, bien avant la commande de 1941. Parmi les hungarismes de ces pièces, citons l’usage de mélodies modales fondées sur les gammes mixolydienne et dorienne, ainsi que de fréquents sauts de quarte mélodiques (dans les deux derniers chants).
  6 Arthur Benjamin (1893-1960) : Elegiac Mazurka [2'51]
Arthur Benjamin, né en Australie et formé en Grande-Bretagne, vivait à Vancouver au début de la Seconde Guerre mondiale. Il avait été l’un des professeurs de Britten au Royal College of Music de Londres. Son Elegiac Mazurka est dominée par le rythme pointé typique de cette danse, utilisé avec un effet saisissant.
  7 Theodore Chanler (1902-1961) : Aftermath [1'03]
Surtout connu pour ses chansons savantes, Theodore Chanler étudia avec Ernest Bloch à Cleveland et avec Boulanger à Paris. Son Aftermath est un bijou romantique, lyrique et apaisant.
  8 Felix Labunski (1892-1979) : Threnody [3'27]
Immigré polonais, Felix Labunski déménagea aux États-Unis en 1936 et choisit la ville de Cincinnati. Il était particulièrement redevable à Paderewski qui, suite à leur rencontre parisienne en 1928, avait financé la fin de ses études avec Dukas et Boulanger. Outre sa Threnody, pièce fort intense douée d’une splendide section centrale cantabile, il dédia à son mentor un poème symphonique intitulé In memoriam.
  9 Mario Castelnuovo-Tedesco (1895-1968) : Hommage à Paderewski [3'55]
Né en Italie, Mario Castelnuovo-Tedesco s’installa en Californie, où il signa la musique de quelque deux cent cinquante films hollywoodiens. Son Hommage à Paderewski est une tendre mazurka dotée d’un singulier passage façon cadenza, vers la fin.
10 Sir Eugene Goossens (1893-1962) : Homage [2'21]
Né et éduqué en Grande-Bretagne, le compositeur et chef d’orchestre Eugene Goossens dirigeait le Cincinnati Symphony Orchestra, dans l’Ohio, quand éclata la Seconde Guerre mondiale. Son Homage repose sur le Prélude en ut mineur de Chopin.
11 Richard Hammond (1896-1980) : Dance [3'22]
Émigré d’Angleterre en Amérique pendant la Première Guerre mondiale, Richard Hammond, son diplôme de Yale en poche, s’installa finalement à Los Angeles, près d’Igor Stravinski, qui fut l’un de ses plus proches amis dans les années 1940 et 1950. Sa Danse, pièce rythmique et exubérante en mètres mixtes, offre un contraste bienvenu avec la noirceur et la sobriété du morceau précédent.
12 Darius Milhaud (1892-1974) : Choral [1'55]
Émigré aux États-Unis en 1941, le Français Darius Milhaud pourvut à l’album par un Choral à 5/4. Harmoniquement, l’hymne est polytonal, avec les deux mains jouant simultanément dans une tonalité différente.
13 Bohuslav Martinu (1890-1959) : Mazurka H284 [1'51]
Comme d’autres, Bohuslav Martinu écrivit une mazurka pour le volume commémoratif; elle est de forme ABA, avec les sections extrêmes marquées Moderato poco andante et la section médiane marquée Poco vivo. Arrivé en Amérique en 1941, ce prolifique compositeur tchèque vécut à New York jusqu’en 1956, date de son retour en Europe.
14 Joaquín Nin-Culmell (1908-2004) : In Memoriam Paderewski [1'16]
Compositeur d’ascendance cubaine né à Berlin, Joaquín Nin-Culmell, émigré aux États-Unis en 1939, écrivit énormément pour la guitare—une centaine de pièces. In Memoriam Paderewski est, là encore, une courte mazurka, rendue légèrement latino-américaine par le recours à la syncope, dans la seconde moitié de l’œuvre. La main droite joue alors à 3/4 pendant que la gauche joue à 6/8.
15 Emerson Whithorne (1884-1958) : Hommage Op 58 No 2 [4'06]
Natif de Cleveland, Emerson Whithorne fut formé en Europe, où il étudia notamment le piano avec Leschetizky, le maître de Paderewski. De retour aux États-Unis en 1915, il enseigna la composition à Richard Hammond, auteur de la Danse également proposée ici. Ensemble, Hammond et Whithorne fondèrent la Composers’ Music Corporation à New York, une structure spécialisée dans l’édition de partitions de musique contemporaine. L’Hommage de Whithorne est, pour l’essentiel, écrit sur quatre portées. Son thème, marqué Lento, est fondé sur un motif rythmique incluant une figure de triolets qui domine les sections extrêmes de la composition. Le rythme solennel, à pas lents, crée un climat abattu.
16 Vittorio Rieti (1898-1994) : Allegro danzante [1'54]
Né en Égypte, l’Italien Vittorio Rieti étudia avec Respighi. Il émigra aux États-Unis en 1940 et s’installa à New York. Son Allegro danzante, charmant et étincelant, rompt l’endeuillement suscité par l’œuvre de Whithorne. De style néoclassique, il présente des échos scarlattiens. Quant aux fréquentes ponctuations pianistiques exécutées en octaves aux deux mains, elles rappellent le Caprice des Humoresques de concert op. 14 de Paderewski.
17 Ernest Schelling (1876-1939) : Con tenerezza [3'41]
Quand vint l’heure de compiler l’album, en 1941, la veuve d’Ernest Schelling proposa l’ultime œuvre de son mari, dont la mort (en 1939) avait bouleversé Paderewski—il eût souhaité, elle le savait, s’associer à tout hommage rendu à son maître et mentor. Sans titre, cette pièce porte l’indication de tempo Con tenerezza.
18 Karol Rathaus (1895-1954) : Kujawiak [2'39]
Né à Tarnopol (l’actuelle Ternopil ukrainienne), Karol Rathaus reçut sa formation musicale à Berlin et à Vienne. En 1938, il gagna New York où il passa le restant de ses jours. De style néoclassique, sa Kujawiak (une danse polonaise ternaire) est marquée par une mélodie extrêmement chromatique et flexueuse.
19 Sigismond Stojowski (1870-1946) : Cradle Song [2'28]
Comme Schelling, Sigismond Stojowski fut parmi les rares pianistes à avoir eu le privilège de longuement étudier avec Paderewski. Après avoir étudié à Cracovie et à Paris, Zygmunt, de son prénom polonais, partit en 1905 à New York, où il intégra la faculté de l’Institute of Musical Arts. Son Cradle Song est une berceuse hispano-américaine fondée sur Alarroro rito, une berceuse qu’il tenait de Luisa, son épouse péruvienne, d’ailleurs rencontrée grâce à Paderewski.
20 Jaromír Weinberger (1896-1967) : Étude in G major [4'11]
En 1939, le Pragois Jaromír Weinberger fuit sa terre natale pour l’Amérique. Dans son Étude en sol majeur, il incorpore un hymne patriotique polonais du XIXe siècle, Z dymem pozarów («De la fumée des feux»), et propose au pianiste un extraordinaire tour de force. Edward Elgar utilisa cette même mélodie dans le prélude symphonique Polonia qu’il dédia à Paderewski lors de la Première Guerre mondiale.
21 Benjamin Britten (1913-1976) : Mazurka elegiaca Op 23 No 2 [8'21]
with Aaron Shorr (piano)
Se méprenant sur la commande, Benjamin Britten composa non une œuvre pour piano solo mais une Mazurka elegiaca pour deux pianos, qu’il fallut donc publier à part. Il y appréhende la mélancolie propre à tant de mazurkas chopiniennes, saluant ainsi le grand interprète de Chopin qu’avait été Paderewski.
22 Aleksander Zarzycki (1834-1895) : Chant du printemps Op 34 No 1 [3'10]
Né à Lwów (l’actuelle Lviv ukrainienne), Aleksander Zarzycki étudia à Berlin et à Paris avant de s’installer à Varsovie. Co-fondateur et premier directeur de la Société musicale de cette ville, il dirigea aussi le chœur de la cathédrale Saint-Jean, dont la crypte renferme la dépouille de Paderewski. De saveur française, son Chant du printemps est un morceau de salon typique. Passé une introduction programmatique de nymphes printanières accueillant l’auditeur avec leurs harpes, une splendide mélodie reprend des réminiscences des Romances sans paroles de Mendelssohn.
23 Cécile Chaminade (1857-1944) : Étude symphonique Op 28 [5'54]
Cécile Chaminade étudia à Paris auprès de différents professeurs, dont le compositeur Benjamin Godard. Bien que prolifique, elle vit sa musique sombrer dans l’oubli. En 1913, elle devint la première compositrice distinguée par la Légion d’honneur. Malgré l’écho schumannien de son titre, l’Étude symphonique part dans le style d’un nocturne chopinien avant d’adopter l’oscillation entre lyrisme (Andante) et drame (Allegro appassionato) propre à la période romantique.
24 Felix Blumenfeld (1863-1931) : Kujawiak – Obertas   (No 2 from Suite polonaise No 2, Op 31)[3'12]
Felix Blumenfeld naquit à Kovalevka (alors en Russe, aujourd’hui en Ukraine), d’un père autrichien et d’une mère polonaise, Maria Szymanowska. Il était l’oncle de Karol Szymanowski. Il étudia la composition avec Rimski-Korsakov, à Saint-Pétersbourg, et compta parmi ses élèves de piano Vladimir Horowitz, Heinrich Neuhaus (son neveu) et Wiktor Labunski (dont le frère aîné, Felix, contribua au présent Hommage). La Kujawiak enregistrée ici—en fait, le deuxième mouvement de sa Suite polonaise no2 op. 31—est marquée Allegretto et se meut en une Obertas frénétique (danse polonaise enjouée marquée Vivo). Le tempo de la Kujawiak revient avant que la pièce s’achève dans un tourbillon dansant (Più mosso e molto vivo).

 

Introduction

Notes by Joseph A Herter
© 2011 Hypérion

A man of many titles in both the world of politics and music, Ignacy Jan Paderewski (1860–1941) was one of the human wonders of the late nineteenth and first half of the twentieth centuries. Presidents and kings, generals and statesmen, as well as millions of freedom- and music-loving people, fell under the spell of his impassioned pleas for an independent Poland or succumbed to his magical renditions of Chopin.

The awards bestowed upon him ranged from the Legion of Honour and Order of the British Empire to Poland’s Virtuti Militari, along with many honorary doctorates from European and American universities. He was Poland’s first Premier and Minister of Foreign Affairs following the Great War, her delegate at the Treaty of Versailles Peace Conference and Ambassador of Poland at the League of Nations. Pianist and composer, a millionaire and the highest-paid musician of his day, he was also a philanthropist and humanitarian. Camille Saint-Saëns described him as ‘a genius who happens to play the piano’. A superstar of his time, he was idolized by the public, and owing to the immense popularity of his Minuet in G he became a household name. The Minuet was still making the charts of all-time recorded hits a dozen years after his death (The New York Times, 22 March 1953). Nearly twenty years before his death, following a recital he played in Detroit on 14 January 1924, W K Kelly, a critic for The Detroit News, lamented a future world without Paderewski: ‘When Paderewski closes his piano for the last time, a star will have fallen from heaven. Other stars may rise, but then there will be none like him for many a year. He is the Sirius of our skies. He will pass into legend.’

The inspiration for creating this Homage to Paderewski came from an album of piano music bearing the same title published by Boosey & Hawkes in 1942. Originally intended to celebrate the golden jubilee of Paderewski’s first American concert tour of 1891, his untimely death on 29 June 1941 caused a delay in publication, and the volume was then released in memoriam to mark his passing.

Of the twenty-two pieces written by twenty-one composers on this recording, seventeen were intended for the memorial piano album. The pieces recorded here that were not written for the original printed anthology include those by Schelling, Wieniawski, Zarzycki, Chaminade and Blumenfeld—although like the works from the 1942 publication, each of these pieces was also dedicated to Paderewski.

The anthology’s editor, music librarian Dorothy Lawton, was responsible for contacting the composers, all living in North America, to contribute to the collection. There were only three native-born Americans in this group: Chanler, Schelling and Whithorne. Some of the composers emigrated to the USA before World War II, including Stojowski, Hammond and Labunski, while Arthur Benjamin, Britten and Goossens were in either the USA or Canada at the outbreak of the war. The remaining composers were either self-exiled musicians such as Bartók, Nin-Culmell and Martinu, who were fleeing the rule of Nazi oppression and the eventual destruction of their homelands, or Jewish musicians such as Castelnuovo-Tedesco, Rieti, Milhaud, Rathaus and Weinberger, seeking refuge from the Holocaust. These composers—along with many other famous European composers who also settled in the USA during the 1940s, including Hindemith, Schoenberg, Stravinsky and Weill—paved the way for America to become an international leader in new trends in Western music following World War II.

Józef Wieniawski was the younger brother of the more famous violinist/composer Henryk. Like his brother, he was born in Lublin and studied in Paris where he took first prize in piano at the Paris Conservatory at the age of twelve in 1849. He settled in Warsaw and became the second director of the Warsaw Musical Society until in his later life he moved to Brussels to teach at the conservatory. Wieniawski’s music was once described by one of his contemporaries as being ‘full of original ideas’, but at the same time ‘dry and pensive’. His Étude Op 44 No 22 is virtuosic and Chopinesque.

Born in New Jersey, Ernest Schelling studied with Paderewski for several years in the 1890s. The Impressionistic Nocturne (Ragusa), bearing the dedication ‘To my master, I. J. Paderewski’, is at times reminiscent of Debussy’s La mer. Published in 1926, it was later recorded by Paderewski on Victor Records.

The 1942 Boosey & Hawkes publication opens with the Three Hungarian Folk-Tunes Sz66 (BB80b) by Béla Bartók, which were composed many years before the commission, in 1914–18. The Hungarian characteristics of these pieces include the use of modal melodies based on the Mixolydian and Dorian scales and frequent melodic leaps of the fourth as found in the last two folksongs.

Arthur Benjamin, Australian-born and British-trained, was living in Vancouver at the beginning of World War II. He had been one of Britten’s teachers at the Royal College of Music in London. His Elegiac Mazurka is dominated by this dance’s trademark dotted rhythm, which is used with dramatic effect.

Best remembered for his art songs, Theodore Chanler studied with Ernest Bloch in Cleveland and Boulanger in Paris. His Aftermath is a romantic gem, lyrical and soothing.

A Polish immigrant, Felix Labunski relocated to America in 1936 and settled in Cincinnati. He was especially indebted to Paderewski, who, following their meeting in Paris in 1928, funded the remainder of his studies with Dukas and Boulanger. In addition to his Threnody, a very intense piece with a beautiful cantabile middle section, Labunski also dedicated a symphonic poem entitled In memoriam to his mentor.

Born in Italy, Mario Castelnuovo-Tedesco settled in California where he composed the music to some 250 Hollywood films. His musical tribute Hommage à Paderewski is a sweet mazurka with a strange cadenza-like passage before the end.

British-born and educated, a composer as well as a conductor, Eugene Goossens was working as conductor of the Cincinnati Symphony Orchestra in Ohio at the outbreak of World War II. Goossens’ Homage is based on Chopin’s Prelude in C minor.

Richard Hammond moved from England to America during World War I, graduated from Yale and eventually settled in Los Angeles near Igor Stravinsky, one of his closest friends during the 1940s and 1950s. Hammond’s Dance, a rhythmic and exuberant work in mixed metres, provides a welcome contrast to the sombre and sobering piece of Goossens that precedes it.

The French composer Darius Milhaud emigrated to the USA in 1941. His contribution to the piano album was a Choral in 5/4 metre. Harmonically, the hymn is polytonal with the two hands playing simultaneously in different keys.

Bohuslav Martinu also composed a mazurka for the memorial volume; this one is in ABA form with the outer sections marked Moderato poco andante and the middle section marked Poco vivo. The prolific Czech composer arrived in America in 1941 and settled in New York until he returned to Europe in 1956.

Born in Berlin of Cuban ancestry, Joaquín Nin-Culmell moved to the USA in 1939. He was a prolific composer for the guitar, writing some 100 pieces. In Memoriam Paderewski is another short mazurka, and Nin-Culmell adds a bit of Latin American flavour by the use of syncopation in the second half of the piece. This is achieved by the right hand playing in 3/4 while the left hand simultaneously plays in 6/8.

A native of Cleveland, Emerson Whithorne studied in Europe, including the piano with Leschetizky, who had also been Paderewski’s teacher. At some point following his return to the USA in 1915 he gave composition lessons to Richard Hammond, composer of the Dance found earlier in the volume. Hammond and Whithorne cofounded the Composers’ Music Corporation in New York, specializing in publishing the scores of contemporary composers. Most of Whithorne’s Hommage is written on four staves. Marked Lento, the theme of this piece is based on a rhythmic motif that incorporates a triplet figure which dominates the opening and closing sections of the work. The solemn, slow-moving pace creates a depressed mood.

Born in Egypt, the Italian Vittorio Rieti studied with Respighi. He went to the USA in 1940 and settled in New York. The delightful and sparkling Allegro danzante breaks the spirit of mourning created by Whithorne’s piece. Neoclassical in style, one can hear echoes of Scarlatti in this dance. Rieti’s frequent pianistic punctuations played in octaves by both hands also remind the listener of Paderewski’s own Caprice from his Humoresques de concert, Op 14.

The death in 1939 of Paderewski’s student Ernest Schelling caused the master much grief, and when the volume in Paderewski’s honour was being compiled in 1941 Schelling’s widow submitted her husband’s last composition, knowing that he would have wanted to share in any tribute to his mentor. The piece is untitled, and has the tempo marking Con tenerezza.

Born in Tarnopol (now Ternopil, Ukraine), Karol Rathaus received his musical training in Berlin and Vienna. In 1938 the composer moved to New York where he spent the rest of his life. Neoclassical in style, Rathaus’s Kujawiak (a Polish dance in triple metre) is characterized by its highly chromatic and sinuous melody.

Like Schelling, Sigismond Stojowski had the distinction of being one of the few pianists to have studied with Paderewski over a long period of time. Zygmunt, as he was called in Polish, studied in Cracow and Paris. He moved to New York in 1905 to be on the founding faculty of the Institute of Musical Art. Stojowski’s Cradle Song is a Spanish-American berceuse based on the lullaby Alarroro rito which Stojowski learned from his Peruvian wife, Luisa. In fact, it was thanks to Paderewski that Zygmunt and Luisa first met.

Jaromír Weinberger was born in Prague, and fled his native country for America in 1939. In his Étude in G major the composer incorporates a Polish patriotic hymn of the nineteenth century, Z dymem pozarów (‘From the smoke of fires’), and provides the pianist with an extraordinary tour de force. The same melody was used by Edward Elgar in his symphonic prelude Polonia, dedicated to Paderewski during World War I.

Benjamin Britten misunderstood the commission and composed a work, entitled Mazurka elegiaca, scored for two pianos, instead of writing one for solo piano. Thus although it was intended for the volume it had to be published separately. Britten captures the melancholy characteristic of so many of Chopin’s mazurkas, thereby saluting Paderewski as the great Chopin interpreter.

Aleksander Zarzycki was born in Lwów (now Lviv, Ukraine), studied in Berlin and Paris, and settled in Warsaw. He was a co-founder and the first director of the Warsaw Musical Society as well as the choir conductor at St John’s Archcathedral where Paderewski’s remains are entombed in the crypt. French in flavour, the Chant du printemps is a typical morceau de salon. Following a programmatic-like introduction of springtime nymphs welcoming the listener on their harps, a beautiful melody reminiscent of Mendelssohn’s Songs without Words takes over.

Cécile Chaminade studied in Paris with several teachers, including the composer Benjamin Godard. Although a prolific composer, her music (in common with that of several other composers on this recording) has fallen into obscurity. In 1913 she became the first woman composer to be awarded the Légion d’honneur. Although the title Étude symphonique is reminiscent of Schumann, the music begins in the style of a Chopin nocturne, and then alternates between the lyrical (Andante) and dramatic (Allegro appassionato) in a manner characteristic of the Romantic period.

Felix Blumenfeld was born of an Austrian father and Polish mother (Maria Szymanowska) in Kovalevka, Russia (now in Ukraine). He was Karol Szymanowski’s uncle. He studied composition with Rimsky-Korsakov in St Petersburg, and his own piano students included Vladimir Horowitz, Heinrich Neuhaus (also his nephew) and Wiktor Labunski (the younger brother of Homage composer Felix). The Kujawiak recorded here, the second movement of his Suite polonaise No 2, Op 31, is marked Allegretto and develops into a frenzied Obertas (a lively Polish dance marked Vivo). The tempo of the Kujawiak returns, before the piece ends in a dancing whirlwind (Più mosso e molto vivo).

Joseph A Herter © 2011

Homme bardé de titres en politique comme en musique, Ignacy Jan Paderewski (1860–1941) fut une des merveilles du genre humain de la fin du XIXe siècle et de la première moitié du XXe siècle. Des présidents et des rois, des généraux et des hommes d’État, mais aussi des millions de gens épris de liberté et de musique tombèrent sous le charme de ses vibrantes suppliques pour une Pologne indépendante ou succombèrent à ses magiques interprétations de Chopin.

Les honneurs qui lui furent conférés allèrent de la Légion d’honneur et de l’Ordre de l’Empire britannique au Virtuti Militari polonais, sans oublier maints doctorats honoraires décernés par des universités européennes et américaines. Juste après la Grande guerre, il fut le premier Premier ministre et le premier ministre des Affaires étrangères de la Pologne, pays dont il fut le délégué au traité de Versailles et l’ambassadeur à la Société des Nations. Pianiste et compositeur, millionnaire et musicien le mieux payé de son temps, il fut aussi un philanthrope, un humanitariste. Saint-Saëns dira de lui: c’est «un génie qui se trouve jouer du piano». Superstar idolâtrée du public, il dut à son Menuet en sol, immensément populaire, d’être connu dans le monde entier. Douze ans après sa mort, ce menuet demeurait classé parmi les plus grands succès discographiques de tous les temps (The New York Times, 22 mars 1953). À l’issue d’un récital donné à Détroit le 14 janvier 1924, W. K. Kelly, critique de The Detroit News, déplora, avec presque vingt ans d’avance, un monde sans Paderewski: «Quand Paderewski refermera son piano pour la dernière fois, une étoile aura cessé de briller dans le firmament. D’autres étoiles pourront naître, mais il n’y en aura pas une pareille avant bien des années. Il est le Sirius de nos cieux. Il entrera dans la légende.»

Cet Hommage à Paderewski nous a été inspiré par un album de musique pianistique publié, sous le même titre, par Boosey & Hawkes, en 1942. D’abord destiné à célébrer le cinquantième anniversaire de la première tournée américaine de Paderewski, en 1891, il vit sa parution retardée par la mort inattendue du compositeur, le 29 juin 1941; il fut finalement publié in memoriam, pour marquer sa disparition.

Sur les vingt-deux pièces réunies ici, émanant de vingt et un compositeurs, dix-sept furent conçues pour l’album commémoratif de 1942, les cinq autres étant celles de Schelling, Wieniawski, Zarzycki, Chaminade et Blumenfeld—mais toutes, sans exception, sont dédiées à Paderewski.

L’éditrice de l’anthologie originale, la bibliothécaire musicale Dorothy Lawton, fut chargée de contacter les compositeurs, vivant tous en Amérique du Nord, en vue d’obtenir leur contribution. Parmi eux se trouvaient trois Américains de naissance: Chanler, Schelling et Whithorne. D’autres avaient émigré aux États-Unis avant la Seconde Guerre mondiale (ainsi Stojowski, Hammond et Labunski), tandis qu’Arthur Benjamin, Britten et Goossens se trouvaient aux États-Unis ou au Canada quand la guerre éclata. Pour le reste, il s’agissait soit de musiciens qui s’étaient exilés pour fuir l’oppression nazie et la destruction de leur patrie (Bartók, Nin-Culmell ou encore Martinu), soit de musiciens juifs (tels Castelnuovo-Tedesco, Rieti, Milhaud, Rathaus et Weinberger) cherchant asile pour échapper à l’Holocauste. Tous ces compositeurs—comme maints autres européens célèbres, émigrés aux États-Unis dans les années 1940 (Hindemith, Schoenberg, Stravinski ou encore Weill)—pavèrent la voie à une Amérique bientôt fer de lance des nouveaux courants qui marquèrent la musique occidentale de l’après-guerre.

Józef Wieniawski était moins connu que son frère aîné Henryk, illustre violoniste-compositeur. Né comme lui à Lublin, il étudia à Paris, où il remporta le premier prix de piano au Conservatoire en 1849, à l’âge de douze ans. Il s’installa ensuite à Varsovie, dont il devint le deuxième directeur de la Société musicale; vers la fin de sa vie, il emménagea à Bruxelles pour enseigner au Conservatoire. De sa musique, l’un de ses contemporains dit qu’elle était ensemble «pleine d’idées originales» et «sèche et pensive». Son Étude op. 44 no22 est virtuose et chopinesque.

Né dans le New Jersey, Ernest Schelling étudia avec Paderewski pendant plusieurs années, dans la dernière décennie du XIXe siècle. Son Nocturne (Ragusa) impressionniste, dédié «À mon maître, I. J. Paderewski», rappelle parfois La mer de Debussy. Publié en 1926, il sera enregistré par Paderewski pour Victor Records.

Le volume Boosey & Hawkes s’ouvre sur les Trois airs folkloriques hongrois Sz66 (BB80b) de Béla Bartók, composés en 1914–18, bien avant la commande de 1941. Parmi les hungarismes de ces pièces, citons l’usage de mélodies modales fondées sur les gammes mixolydienne et dorienne, ainsi que de fréquents sauts de quarte mélodiques (dans les deux derniers chants).

Arthur Benjamin, né en Australie et formé en Grande-Bretagne, vivait à Vancouver au début de la Seconde Guerre mondiale. Il avait été l’un des professeurs de Britten au Royal College of Music de Londres. Son Elegiac Mazurka est dominée par le rythme pointé typique de cette danse, utilisé avec un effet saisissant.

Surtout connu pour ses chansons savantes, Theodore Chanler étudia avec Ernest Bloch à Cleveland et avec Boulanger à Paris. Son Aftermath est un bijou romantique, lyrique et apaisant.

Immigré polonais, Felix Labunski déménagea aux États-Unis en 1936 et choisit la ville de Cincinnati. Il était particulièrement redevable à Paderewski qui, suite à leur rencontre parisienne en 1928, avait financé la fin de ses études avec Dukas et Boulanger. Outre sa Threnody, pièce fort intense douée d’une splendide section centrale cantabile, il dédia à son mentor un poème symphonique intitulé In memoriam.

Né en Italie, Mario Castelnuovo-Tedesco s’installa en Californie, où il signa la musique de quelque deux cent cinquante films hollywoodiens. Son Hommage à Paderewski est une tendre mazurka dotée d’un singulier passage façon cadenza, vers la fin.

Né et éduqué en Grande-Bretagne, le compositeur et chef d’orchestre Eugene Goossens dirigeait le Cincinnati Symphony Orchestra, dans l’Ohio, quand éclata la Seconde Guerre mondiale. Son Homage repose sur le Prélude en ut mineur de Chopin.

Émigré d’Angleterre en Amérique pendant la Première Guerre mondiale, Richard Hammond, son diplôme de Yale en poche, s’installa finalement à Los Angeles, près d’Igor Stravinski, qui fut l’un de ses plus proches amis dans les années 1940 et 1950. Sa Danse, pièce rythmique et exubérante en mètres mixtes, offre un contraste bienvenu avec la noirceur et la sobriété du morceau précédent.

Émigré aux États-Unis en 1941, le Français Darius Milhaud pourvut à l’album par un Choral à 5/4. Harmoniquement, l’hymne est polytonal, avec les deux mains jouant simultanément dans une tonalité différente.

Comme d’autres, Bohuslav Martinu écrivit une mazurka pour le volume commémoratif; elle est de forme ABA, avec les sections extrêmes marquées Moderato poco andante et la section médiane marquée Poco vivo. Arrivé en Amérique en 1941, ce prolifique compositeur tchèque vécut à New York jusqu’en 1956, date de son retour en Europe.

Compositeur d’ascendance cubaine né à Berlin, Joaquín Nin-Culmell, émigré aux États-Unis en 1939, écrivit énormément pour la guitare—une centaine de pièces. In Memoriam Paderewski est, là encore, une courte mazurka, rendue légèrement latino-américaine par le recours à la syncope, dans la seconde moitié de l’œuvre. La main droite joue alors à 3/4 pendant que la gauche joue à 6/8.

Natif de Cleveland, Emerson Whithorne fut formé en Europe, où il étudia notamment le piano avec Leschetizky, le maître de Paderewski. De retour aux États-Unis en 1915, il enseigna la composition à Richard Hammond, auteur de la Danse également proposée ici. Ensemble, Hammond et Whithorne fondèrent la Composers’ Music Corporation à New York, une structure spécialisée dans l’édition de partitions de musique contemporaine. L’Hommage de Whithorne est, pour l’essentiel, écrit sur quatre portées. Son thème, marqué Lento, est fondé sur un motif rythmique incluant une figure de triolets qui domine les sections extrêmes de la composition. Le rythme solennel, à pas lents, crée un climat abattu.

Né en Égypte, l’Italien Vittorio Rieti étudia avec Respighi. Il émigra aux États-Unis en 1940 et s’installa à New York. Son Allegro danzante, charmant et étincelant, rompt l’endeuillement suscité par l’œuvre de Whithorne. De style néoclassique, il présente des échos scarlattiens. Quant aux fréquentes ponctuations pianistiques exécutées en octaves aux deux mains, elles rappellent le Caprice des Humoresques de concert op. 14 de Paderewski.

Quand vint l’heure de compiler l’album, en 1941, la veuve d’Ernest Schelling proposa l’ultime œuvre de son mari, dont la mort (en 1939) avait bouleversé Paderewski—il eût souhaité, elle le savait, s’associer à tout hommage rendu à son maître et mentor. Sans titre, cette pièce porte l’indication de tempo Con tenerezza.

Né à Tarnopol (l’actuelle Ternopil ukrainienne), Karol Rathaus reçut sa formation musicale à Berlin et à Vienne. En 1938, il gagna New York où il passa le restant de ses jours. De style néoclassique, sa Kujawiak (une danse polonaise ternaire) est marquée par une mélodie extrêmement chromatique et flexueuse.

Comme Schelling, Sigismond Stojowski fut parmi les rares pianistes à avoir eu le privilège de longuement étudier avec Paderewski. Après avoir étudié à Cracovie et à Paris, Zygmunt, de son prénom polonais, partit en 1905 à New York, où il intégra la faculté de l’Institute of Musical Arts. Son Cradle Song est une berceuse hispano-américaine fondée sur Alarroro rito, une berceuse qu’il tenait de Luisa, son épouse péruvienne, d’ailleurs rencontrée grâce à Paderewski.

En 1939, le Pragois Jaromír Weinberger fuit sa terre natale pour l’Amérique. Dans son Étude en sol majeur, il incorpore un hymne patriotique polonais du XIXe siècle, Z dymem pozarów («De la fumée des feux»), et propose au pianiste un extraordinaire tour de force. Edward Elgar utilisa cette même mélodie dans le prélude symphonique Polonia qu’il dédia à Paderewski lors de la Première Guerre mondiale.

Se méprenant sur la commande, Benjamin Britten composa non une œuvre pour piano solo mais une Mazurka elegiaca pour deux pianos, qu’il fallut donc publier à part. Il y appréhende la mélancolie propre à tant de mazurkas chopiniennes, saluant ainsi le grand interprète de Chopin qu’avait été Paderewski.

Né à Lwów (l’actuelle Lviv ukrainienne), Aleksander Zarzycki étudia à Berlin et à Paris avant de s’installer à Varsovie. Co-fondateur et premier directeur de la Société musicale de cette ville, il dirigea aussi le chœur de la cathédrale Saint-Jean, dont la crypte renferme la dépouille de Paderewski. De saveur française, son Chant du printemps est un morceau de salon typique. Passé une introduction programmatique de nymphes printanières accueillant l’auditeur avec leurs harpes, une splendide mélodie reprend des réminiscences des Romances sans paroles de Mendelssohn.

Cécile Chaminade étudia à Paris auprès de différents professeurs, dont le compositeur Benjamin Godard. Bien que prolifique, elle vit (comme plusieurs compositeurs figurant sur ce disque) sa musique sombrer dans l’oubli. En 1913, elle devint la première compositrice distinguée par la Légion d’honneur. Malgré l’écho schumannien de son titre, l’Étude symphonique part dans le style d’un nocturne chopinien avant d’adopter l’oscillation entre lyrisme (Andante) et drame (Allegro appassionato) propre à la période romantique.

Felix Blumenfeld naquit à Kovalevka (alors en Russe, aujourd’hui en Ukraine), d’un père autrichien et d’une mère polonaise, Maria Szymanowska. Il était l’oncle de Karol Szymanowski. Il étudia la composition avec Rimski-Korsakov, à Saint-Pétersbourg, et compta parmi ses élèves de piano Vladimir Horowitz, Heinrich Neuhaus (son neveu) et Wiktor Labunski (dont le frère aîné, Felix, contribua au présent Hommage). La Kujawiak enregistrée ici—en fait, le deuxième mouvement de sa Suite polonaise no2 op. 31—est marquée Allegretto et se meut en une Obertas frénétique (danse polonaise enjouée marquée Vivo). Le tempo de la Kujawiak revient avant que la pièce s’achève dans un tourbillon dansant (Più mosso e molto vivo).