La musique à Paris sous l'occupation
Myriam Chimènes & Yannick Simon
Éditions Fayard / Cité de la Musique

ISBN : 978-2-21367-721-7
Date de sortie : 16 octobre 2013

 

 

 

 

 

Actes du Colloque organisé à la Cité de la musique (Paris)
13 et 14 mai 2013.

Sommaire

Le Mot de l'éditeur

Sous l’Occupation, Paris ne reste pas silencieux. Peu après l’installation des Allemands, les musiciens reprennent leurs activités comme l’ensemble des artistes. Les salles de concerts et les studios radiophoniques et d’enregistrement se remettent à fonctionner. Dans ce contexte, nombre d’interprètes et de compositeurs français ont l’opportunité de bénéficier de conditions de travail inédites, profitant de l’absence de concurrence étrangère conjuguée à la mise à l’écart des œuvres des compositeurs, morts ou vivants, exclus par les lois scélérates.
Centré sur la musique savante, cet ouvrage collectif traite de la diffusion de la musique, grâce à des études sur quelques sociétés de concerts spécifiques à cette période, sur des œuvres du répertoire, sur la création contemporaine et sur le rôle de certains interprètes. Il met en évidence les personnalités de Francis Poulenc, Olivier Messiaen et Arthur Honegger ainsi que d'Alfred Cortot, Germaine Lubin, Charles Munch et Wilhelm Kempff, en insistant sur les ambiguïtés entretenues rétroactivement par certains acteurs de la vie musicale sur leur carrière pendant les années noires. Il analyse également la manière dont quelques grandes figures du passé (Mozart, Berlioz, Wagner) sont susceptibles de s'inscrire dans un discours de propagande, largement véhiculé par les critiques et les musicologues.
Cette réflexion sur la trace mémorielle d'une époque se clôt par l'évocation de deux débats récents, qui montrent que ce passé passe difficilement.
Ce livre, qui fait suite à deux journées d’étude, se fixe pour but de faire le point sur les travaux des musicologues et des historiens depuis la parution, en 2001, du premier ouvrage sur le sujet (La Vie musicale sous Vichy, Complexe/IHTP-CNRS). Centrées sur la musique savante, il mettra tout particulièrement l’accent sur sa diffusion, qu’elle concerne les lieux, les œuvres du répertoire, la création contemporaine ou les interprètes.

Ont collaboré à cet ouvrage : François Anselmini, Mathias Auclair, Yves Balmer; Esteban Buch, Jean Gribenski, D. Kern Holoman, Sara Iglesias, Karine Le Bail, Christophe Brent Murray, Aurélien Poidevin, Manuela Schwartz, Nicolas Southon, Leslie Sprout et Jacques Tchamkerten.

Directrice de recherche au CNRS, Myriam Chimènes a notamment été à l'origine des premières recherches sur la vie musicale en France pendant la Seconde Guerre mondiale. La Vie musicale sous Vichy (Complexe IHTP-CNRS, 2001) a été publié sous sa direction.

Professeur à l'Université de Rouen, Yannick Simon travaille notamment sur la vie musicale en France pendant la Seconde Guerre mondiale. Dans le cadre de la Mission d'étude sur la spoliation des juifs de France il a été chargé d'un rapport publié sous le titre La SACEM et les droits des auteurs et compositeurs juifs sous l'Occupation (La Documentation française, 2000). Il est l'auteur de Composer sous Vichy (Symétrie, 2009).

 

Programme

Concerts

24 mars 1942
12 mai 2013 16:30, Amphithéâtre

La Propagandastaffel (littéralement : l’escadron de propagande) était un service chargé par les autorités allemandes du contrôle de la vie culturelle française pendant l’Occupation. Dans un document du 14 septembre 1940 intitulé Réflexions sur l’action politique culturelle, on peut lire : « Au cours des derniers siècles, les Français sont passés maîtres dans l’art de pénétrer les autres peuples par la politique culturelle ». La culture, et la musique notamment, étaient donc considérées par l’occupant comme des armes de guerre, mais d’un genre particulier : la politique culturelle, poursuit le même document, doit « renoncer à être (trop) importune ». Bref, c’est en douceur qu’il s’agit de « susciter un infléchissement durable de la volonté française ».
Pour ce faire, on invita des artistes prestigieux – comme Alfred Cortot, Wilhelm Kempff ou Walter Gieseking – à présenter une vitrine de la haute culture allemande. Le programme de ce concert est la reconstitution de la soirée du 24 mars 1942 donnée par le Quatuor Peter à l’Institut allemand de Paris.

En temps de guerre
13 mai 2013 20:00, Salle des concerts

Olivier Messiaen était prisonnier en Allemagne, en 1941, lorsqu’il écrivit le Quatuor pour la fin du Temps, qui fut joué par ses codétenus au Stalag VIII A. La partition porte la marque de ce contexte, au moins dans son instrumentation de fortune : un violon, une clarinette, un violoncelle et un piano, tels étaient les moyens disponibles.
Charles Koechlin écrivit quant à lui ses Chants de Kervéléan dans la demeure de Jules Guieysse en Bretagne, où le compositeur avait trouvé refuge durant l’occupation allemande à partir de juin 1940. Et Darius Milhaud, qui avait dû émigrer aux États-Unis car son nom figurait sur la liste des artistes juifs recherchés, composa ses Esquisses pour piano à Mills College (Oakland), où il était invité à enseigner. Toutes les oeuvres au programme de ce concert sont nées, d’une manière ou d’une autre, en temps de guerre.

Chants officiels, Chants du silence
14 mai 2013 20:00, Amphithéâtre

Des hymnes à Pétain (La Française d’André Gailhard en 1941) ou des oeuvres qui lui furent offertes (Jean Françaix dédiant sa Cantate « à Monsieur le Maréchal Philippe Pétain Chef de l’État Français »). Des compositeurs couverts d’honneurs, comme Florent Schmitt, alors que d’autres, comme Darius Milhaud, doivent fuir la France. Et d’autres encore, comme Paul Arma, qui s’y étaient réfugiés en quittant l’Allemagne nazie, pour devoir ensuite se cacher afin de tenter de survivre… Entre collaboration et résistance, la vie musicale a connu bien des déchirures.

Concert diffusé, le 31 mai à 14h, sur France Musique. (*)

La musique pendant l'Occupation
16 mai 2013 20:00, Amphithéâtre

Louis Ferdinand Céline, l’auteur du célèbre Voyage au bout de la nuit (son premier roman publié en 1932), est un des plus grands écrivains français du XXe siècle. Il fut aussi, on le sait, un antisémite notoire : « Pleurer, c’est le triomphe des Juifs », écrivait-il le 4 septembre 1941 dans le journal collaborationniste Notre Combat pour la Nouvelle France Socialiste, tout en se décrivant dans sa correspondance comme « l’ennemi n° 1 des Juifs ».
Ce qu’on savait beaucoup moins, jusqu’à la publication de la thèse de Michaël Ferrier (Céline et la chanson, Du Lérot, 2004), c’est que Céline est également l’auteur de nombre de chansons, comme À nœud coulant (« Vive Katinka la putain / Celle qui n’aime que le matin… ») ou Règlement (« Je te trouverai charogne ! Un vilain soir ! Je te ferai dans les mires ! Deux grands trous noirs ! »). Un singulier répertoire à découvrir, avec Arnaud Marzorati accompagné par un accordéon et une percussion.

On chantait quand même (création)
18 mai 2013 20:00, Amphithéâtre

Pendant l'Occupation, la radio continue de fonctionner. Les radios faudrait-il préciser, tant les fréquences officielles ou interdites ont diffusé musique et messages en permanence, entre 1940 et 1944.
Ce spectacle est le reflet et de ces mondes radiophoniques multiples, donnant à la chanson des statuts de symboles. Chansons pour les troupes, cabaret, chansons mondaines, chansons d'exil, chansons intimes, chansons résistantes, chansons allemandes...
« Pour ce spectacle, explique Serge Hureau, nous traiterons notre public en auditeurs de TSF. Les musiciens auront revêtu la blouse des techniciens de la radio, jouant des paysages sonores à coup d’instruments ou d’électronique primitive. Nos chanteurs, tantôt prendront des airs de speakers, tantôt épouseront, jouant de leur invisibilité, toutes les voix d’une époque. Toute la saveur sera dans le contraste du donné à entendre et du donné à voir. »

(*) Après-concert - Musique sous l'Occupation

15h15 - Arthur Honegger : Symphonie n°2 Finale
Tonhalle de Zurich, direction David Zinman
DECCA 455 352-2

15h22 - Maurice Ravel : Quatuor en Fa majeur
Quatuor Bouillon (enregistré à Paris en 1941)
DB 5 154

15h28 - Olivier Messiaen : Quatuor pour la fin du temps (Louange à l'Immortalité de Jésus)
Het Collectief
Thomas Dieltijens, piano, Wibert Aerts, violon
Fuga Libera FUG540

15h37 - Claude Delvincourt : Radio Sérénade
Orchestre des cadets du Conservatoire, direction Fernand Oubradous (enregistré en 1947)
Voix de son maître SI165

15h41 - Morton Gould : Spirituals (extrait)
Boston Symphony Orchestra, direction Dimitri Mitropoulos (enregistré le 16 décembre 1944)
Boston Archives BSO CB 109/10

15h45 - Maurice Ravel : Petit Poucet de Ma mère l'Oye
Orchestre National, direction Désiré Emile Inghelbrecht
SBT 1264 enr 1955

15h48 - Maurice Ravel : Concerto en sol, 2° mouvement
Monique Haas, piano Orchestre National de la RTF, direction Paul Paray
DGG 00289 477 5353 (enregistré  1965)