Nicolas Benie
Le Souffle de la Liberté, 1944: le Jazz Débarque
ISBN : 978-2-91582-539-8
C&F éditions (2014)
http://cfeditions.com/souffle1944/ressources/specimen_souffle1944.pdf


 

 

 

Le Souffle de la liberté raconte le jazz des années quarante. La spécificité du jazz français (Django Reinhardt, Michel Warlop,...) qui s'est développé sous l'Occupation (contrairement au mythe qui fait croire que le jazz était interdit). Le choc que fut ensuite la rencontre avec le « débarquement » du be-bop. Les scissions au sein du Hot Club de France qui s'en suivirent. Et l'histoire singulière de Sim Copans, débarqué le 7 juin 44 avec un camion sono pour annoncer les avancées alliées dans les villes privées de radios... et qui passait du jazz sur les places publiques avant de devenir l'animateur de radio que l'on sait, et dont Georges Perec « se souvient ».
Le livre est accompagné d'un CD Audio Bonus qui permet d'écouter le jazz de l'époque (160 p. + cd-bonus, 25 €)

6 juin 1944. Ce jour qui sonne comme une victoire sera pour des milliers de jeunes gens leur dernier jour. Le jour le plus long ? Sans doute. Le plus fou tout autant. Les G.I's apportent les V-Discs, disques 78 tours de la Victoire. La danse revient au son du jazz des orchestres de la radio des forces armées américaines. Sim Copans, soldat sans uniforme, conduit un camion sono pour informer et distraire les villes et villages de Normandie au cœur de la furie.
Un peu plus tard débarque le futur du jazz avec le grand orchestre de Dizzy Gillespie. Le jazz français, qui s'est développé pendant la période de l'Occupation, rencontre le be-bop, la modernité du jazz, sans avoir eu le temps de se faire reconnaitre. Scissions et déchirements : le futur n'attend pas. Seul surnagera le génie de Django Reinhardt. Michel Warlop restera le grand oublié.
1944 : à la Libération, je jazz est partout. Il est liberté, et la liberté est sur toutes les lèvres. Il saisit l'air du temps pour accompagner les bouleversements en cours. Il séduit la jeunesse et exprime le désir d'un autre monde.

Le CD audio offert avec ce livre permet de plonger dans le jazz des années quarante, dans l'esprit de l'époque.
En voir plus avec le site compagnon (vidéos d'époques en complément du livre et du CD-bonus)

Présentation du CD audio
Nous avons souhaité offrir aux lecteurs de ce livre un CD audio qui se veut participer pleinement à notre travail d’histoire, souvenirs et mémoire. C’est pour cette raison que le choix s’est porté sur les enregistrements de l’époque nonobstant la qualité technique. Ils sont là aussi pour susciter l’intérêt, pour exciter la curiosité. La discographie du livre permet d’aller plus loin dans la découverte et l’exploration de la musique de cette époque.

1 In the Mood – 3’36 Glenn Miller Orchestra, (Garland – Razaf).
Une sorte de synthèse de toute cette époque appelée swing. L’enregistrement est l’original d’août 1939. Glenn Miller (trombone), chef d’orchestre et arrangement) avec Dale McMickle, Leigh Knowles, Clyde Hurley (trompettes); Al Mastren, Paul Tanner (trombones); Wilbur Schwartz, Hal McIntyre (saxophones alto), Hal Tennyson (saxophone alto et baryton), Tex bebeke, Al Klink (saxophones ténor); Chummy McGregor (piano); Richard Fisher (guitare); Rowland Bundock (contrebasse); Maurice Purtill (batterie). Solistes : Ted Beneke, saxophoniste vedette de l’orchestre, il formera son propre orchestre, et Al Klink (saxophone ténor), Clyde Hurley (trompette).
Classé numéro 1 à partir du 7 octobre 1939 pendant 12 semaines. Malgré le succès, cet enregistrement ne rapportera rien à Glenn Miller qui était payé à la session et pas en droits d’auteur, comme la plupart des musicien(ne)s de jazz à cette époque. La grève du syndicat des musiciens sera aussi porteuse d’une revendication de reconnaissance de l’interprète liée au versement de royalties en fonction des ventes.

2 Sim Copans débarque avec son camion – 3’49
Témoignage enregistré et présenté par Nicolas Beniès, 1994.

3 Saint Louis Blues March – 4’28
Glenn Miller pendant la guerre; composition de W.C. Handy, arrangement de Glenn Miller et Ray McKinley. Un enregistrement de la radio NBC, émission I substain the Wings, soit de juin 1943 (vraisemblable) soit de juin 1944. On ne sait pas exactement qui est présent et qui ne l’est pas.
Collectivement, sont réunis Zeke Zarchy, Bobby Nichols, Bernie Privin, Jack Steele, Whitey Thomas (trompettes); Jim Priddy, Larry Hall, Johnny Halliburton, Jim Harwood (trombones); Hank Freeman, Freddy Guerra, Peanuts Hucko, Vince Carbone, Jack Ferrier, Chuck Gentry (saxophones); Addison Collins (Cor); Mel Powell, Lou Stein (piano); Carmen Mastren (guitare); Trigger Alpert (contrebasse); Ray McKinley (batteur). Plus entre 6 et 18 violons, violons alto, violoncelles. Solistes : Bobby Nichols (trompette), Vince Carbone (saxophone ténor), Hank Freeman (saxophone alto) et Ray McKinley (batterie).

4 Sim Copans raconte la suite de ses aventures radiophoniques – 2’05
Témoignage enregistré et présenté par Nicolas Beniès, 1994.

Du côté des V-Discs, quatre extraits :
5 Ain’t misbehavin – 2’17

6 Two sleepy people – 3’07
Fats Waller, piano et vocal du 23 septembre 1943, vraisemblablement les derniers enregistrements du pianiste qui allait mourir dans le train le ramenant de Kansas City à New York le 15 décembre 1943.
Un hommage en forme de V.

7 Jack Armstrong Blues – 4’54
Louis Armstrong, trompette et vocal rencontre Jack Teagarden, tromboniste et vocaliste reconnaissable à son accent traînant de son Texas natal en même temps qu’une voix colorée par le Bourbon. C’est le début d’une rencontre qui va durer. Ils sont en compagnie des V-Discs all stars ce 6 décembre 1944, soit Bobby Hackett au cornet, gentleman à la sonorité feutrée qui influencera Miles Davis; Ernie Caceres à la clarinette; Nick Caiazza, au saxophone ténor; Johnny Guarnieri au piano – dans la lignée de Fats Waller – Herb Ellis à la guitare qui fait ici ses premiers pas comme musicien professionnel; Al Hall à la contrebasse et William « Cozy » Cole à la batterie, un des grands batteurs de la période swing, qui tournera aussi avec le « All Stars » que constituera Louis Armstrong. Il faut ajouter ici, Billy Butterfield, trompettiste superbe et Lou McGarity au trombone.

8 The major and the minor – 3’53
Lionel Hampton et son orchestre, enregistré le 10 janvier 1944 avec « Cat » Anderson, qui fait partie de l’orchestre d’Ellington; Lammar Wright, un premier trompette réputé; Roy McCoy, Joe Morris (trompettes); Al Hayse, tromboniste qui prend ici un solo; Booty Wood, Fred Beckett aux principal soliste; Gus Evans, saxophoniste alto; Al Sears, saxophoniste ténor qui allait entrer dans l’orchestre de Duke Ellington; Arnett Cobb, saxophoniste ténor qui allait devenir la vedette de l’orchestre de Lionel Hampton quelque temps plus tard; Charlie Fowlkes, saxophoniste baryton de l’orchestre de Count Basie; Milton Buckner, pianiste et inventeur des « block chords », méthode de jeux pratiquée par tous les pianistes qui suivront; Eric Miller (guitare); Vernon King (contrebasse); Fred Radcliff, batteur et Lionel Hampton au vibraphone.

9 These Foolish Things – 3’12
Lester Young s’en revenant de cette armée qui n’était décidément pas faite pour lui, enregistre ce « standard ». Il en fait, en ce mois de décembre 1945, un chef-d’oeuvre. Dodo Marmorosa est le pianiste; « Red » Callender le contrebassiste et Henry Tucker le batteur. Luc Delannoy dans Lester Young, profession : Président (Denoël, Paris, 1987) a raconté le calvaire de Lester Young à l’armée et son enfermement. À 35 ans, son état physique était déjà délabré. Comme le dira Harry « Sweets » Edison, trompettiste en cette année 1945 de l’orchestre de Count Basie, « l’apartheid existait dans l’armée et la pire chose qui pouvait arriver à Lester était d’être envoyé dans un camp du Sud. Non seulement, il ne désirait pas devenir soldat mais il voulait être dans un endroit libre » Le batteur Jo Jones ajoutera que Lester « ne comprenait pas qu’un être humain puisse maltraiter un autre être humain ».
La session de ce mois de décembre 1945 débutera par un D. B. Blues pour Detention Barracks… Le message était clair, il fallait exorciser ce passé récent, la découverte d’un racisme imprégnant toute l’armée américaine.

10 Festival swing 1941 – 4’12
Pendant la période de l’Occupation, le jazz français prospère. Charles Delaunay organise, pour son label Swing qui continue de produire des disques, une jam session, un boeuf comme on dit en français. Le 26 décembre 1940, il réunit dans les studios la fine fleur du jazz français : Pierre Allier, Aimé Barelli, Christian Bellest, Séverin Luino (trompettes); Maurice Gladieu, Guy Paquinet (trombone); Max Blanc (saxophone alto); Noël Chiboust, Alix Combelle, Georges Jacquemont (saxophones ténor); le Quintet du Hot Club de France avec Hubert Rostaing (clarinette); Django Reinhardt (guitare); Joseph « Nin-Nin » Reinhardt, un guitariste qui se révèle aussi pendant cette période, il ne faut pas hésiter à l’entendre; Tony Rovira (contrebasse) et Pierre Fouad (batterie). Charles Delaunay joue le rôle de maître de cérémonie. Il annonce tous les musiciens sauf le quintet. C’est la voix de Rostaing qui annonce Django. Un bref solo du guitariste auréolé d’un génie qui tranche avec le reste.

11 Slummin’ on Park avenue – 2’47
Charlie et son orchestre enregistre en 1941 ce thème de Irving Berlin, un compositeur Juif d’origine Russe exilé aux États-Unis. Une sorte de pied de nez mais on ne sait trop à qui… venant de ce groupe au service de la propagande nazie.

12 Verlaine (instrumental) – 3’22
Orchestre Le jazz de Paris sous la conduite d’Alix Combelle. Enregistrement de 1941. Charles Trenet chantera sur cet air le poème de Verlaine qui commence par « Les sanglots longs / Des violons / De l’automne » qui deviendra sur la BBC le signal du débarquement. Se retrouvent dans l’orchestre Aimé Barelli, Christian Bellest, Séverin Luino (trompettes); Maurice Gladieu (trombone); Max Blanc, Charles Lisée (saxophones alto); Jean Luino, Hubert Rostaing (saxophones ténor); Paul Collot (piano); Joseph Reinhardt (guitare); Tony Rovira (contrebasse); Pierre Fouad (batterie).

13 Nuages – 3’17
Le 13 décembre 1940, pour Swing, Django Reinhardt enregistre cette première version de Nuages qui deviendra une sorte d’hymne de cette période. Il est en compagnie d’Hubert Rostaing et d’Alix Combelle (clarinettes); Joseph “Nin-Nin” Reinhardt (guitare); Tony Rovira (contrebasse) et de Pierre Fouad (batterie).

Deux compositions de Michel Warlop
14 Tempête sur les cordes – 2’30
Michel Warlop et son septuor à cordes, 18 juin 1941. Outre Warlop, soliste au violon, Paulette Izoard, Sylvio Schmidt, Emile Chavannes (violons); Gaston Durand, Matlo Ferret (guitares); Francis Luca (contrebasse). 4

15 Swing concerto – 7’39
Michel Warlop et l’Orchestre symphonique de Jazz de Paris (dir. Robert Bergmann), 17 février 1942. Avec notamment Pierre Spiers (harpe) et Pierre Fouad (percussions). Ces deux exemples des compositions de Michel Warlop pendant l’Occupation devraient vous inciter à découvrir ses autres enregistrements, notamment celui réalisé en compagnie de Django en décembre 1937 (en particulier Christmas Swing).

16 Things to come – 3’22
Dizzy Gillespie and his orchestra, Pleyel, 28 février 1948. Composition de W. Fuller. « Dizzy » Gillespie (trompette et vocal); Ernest – il fera carrière sous le diminutif de« Benny » – Bailey, Dave Burns, Lamar Wright Jr, Elmon Wright (trompettes); Bill Shepherd, Ted Kelly (trombones); John Brown, Howard Johnson (saxophones alto); Joe Gayles, Big Nick Nicholas (saxophones ténor); Cecil Payne (saxophone baryton); John Lewis (piano); Al McKibbon (contrebasse); Kenny Clarke (batterie); Chano Pozo Gonzales (congas).

17 Koko – 2’53
Charlie Parker, enregistré pour Savoy le 26 novembre 1945. Pour le reste de cette session, c’est Miles Davis qui tient la trompette et « Dizzy » le piano. Mais pour ce thème, Miles ne se sentait pas de taille. Diz prend donc sa place. On entend quand même un piano. Re-recording ? Argonne Thornton – plus connu sous le nom musulman de Sadik Hakim – est entré dans le studio… Curley Russell (contrebasse) et Max Roach (batterie) complètent le quintet.

18 Travellin’ Blues – 4’00
Sidney Bechet enregistre en octobre 1949 pour Vogue en compagnie de Claude Luter et son orchestre : Claude Philippe (trompette); Pierre Dervaux (cornet); Bernard Zacharias (trombone); Sidney Bechet (saxophone soprano); Claude Luter (clarinette); Christian Azzi (piano); Roland Blanchine (contrebasse) et « Moustache » Galipides (batterie).

19 Rifftide – 4’34
Une composition de Coleman Hawkins enregistrée par Miles Davis / Tadd Dameron quintet lors du Festival international de jazz le 8 mai 1949. Miles Davis (trompette); Tadd Dameron (piano et arrangements); Barney Spieler (contrebasse) et Kenny Clarke (batterie). L’enregistrement est précédé d’un reportage radio et d’une annonce par Maurice Cullaz.

20 Salt Peanuts – 3’43
Charlie Parker lors de ce même festival de mai 1949, en compagnie de Kenny Dorham (trompette); Al Haig (piano); Tommy Potter (contrebasse) et Max Roach (batterie).

21 Jam session. Blues finale – 4’59
Lors de ce Troisième festival international de jazz, le 15 mai 1949, les musiciens présents se retrouvent salle Pleyel pour une jam session. Charlie Parker (saxophone alto); Sidney Bechet (saxophone soprano); Aimé Barelli, Bill Cileman, Miles Davis, « Hot Lips » Page, Kenny Dorham (trompettes) « Big Chief » Russell Moore (trombone); Hubert Rostaing (clarinette); Pierre Braslavsky (saxophone soprano); Don Byas, James Moody (saxophones ténor); Al Haig (piano); Hazy Osterwald (vibraphone); « Toots » Thielemans (guitare); Tommy Potter (contrebasse) et Max Roach (batterie).