Barraine Elsa (Jacqueline) 1910-1999

Samedi 10 Mars, 2018
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Née à Paris, 13 février 1910, morte à Strasbourg 20 mars 1999.
Fille de Mathieu Barraine, violoncelliste soliste à l'orchestre de l'Opéra de Paris, membre de la Société des Concerts du Conservatoire et d'Octavie, choriste, pianiste amateur.
En 1919 elle est admise au Conservatoire nationale supérieur de Paris. Elle y suit les cours de composition avec Paul Dukas, d'harmonie avec Jean Gallon, de fugue avec Georges Caussade, d'accompagnement au piano avec A. Estyle.
Elle obtient le premier Prix d'harmonie en 1925 et d'accompagnement au piano en 1927.
En 1928, elle obtient le second Grand Prix de Rome avec Héraclès à Delphes, puis en 1929 le premier Grand Prix avec la cantate La Vierge guerrière sur un poème d'Armand Foucher, trilogie sacrée sur Jeanne d'Arc.
Elle séjourne à Rome de 1929 à 1933.


Elsa Barraine en 1929.

De 1936 à 1939 elle est chef de chant à l'Orchestre national de la Radiodiffusion française.
Elle adhère au Parti communiste français en 1938, suite aux accords de Munich. Avec la radio, elle est déplacée à Rennes à la déclaration de la guerre. Elle est exclue de ses fonctions en 1941. Son père, juif, est renvoyé de l'orchestre de l'opéra de Paris.
Au printemps 1941, suite à une initiative du Parti communiste, elle lance un appel pour former un Front national des musiciens, qui ne réunira pas plus d'une quinzaine de Résistants. Elle en sera une des principales animatrices avec Roger Desormière et Louis Durey.
Grâce à Roger Desormière, elle travaille à l'Opéra-Comique de Paris, est bientôt arrêtée puis libérée grâce à un fonctionnaire de la préfecture de police. Son père décède le 24 septembre 1943. Échappant à une souricière, elle entre en clandestinité sous le nom de Catherine Bonnard.


Elsa Barraine, 1940

Elsa Barraine, Symphonie no 2 (1938) (mp3, 16:48)
sous la direction de Manuel Rosenthal.
1. Allegro vivace
2. Marche funèbre, lento
3. Finale, allegretto



Extrait de « Regards », du 5 juillet 1946, hommage à Georges Dudach, fusillé par les Allemands, le 23 mai 1942 au Mont-Valérien.
Il était chargé par le Parti communise de l'organisation de la Résistance dans les milieux universitaires et intellectuels.
Il était le contact d'Elsa Barraine. Son nom figurait dans une liste affichée par les nazis sous le simple titre d' « Avis » qui inspira le célèbre poème de Paul Éluard.

À partir de fin 1944, elle est chroniqueuse musicale au journal l'Humanité.
De 1944 à 1946 elle est directrice de l'Orchestre National et directrice musicale des édition du Chant du Monde.
En 1949, elle participe à l'Association des musiciens progressistes, avec Serge Nigg, Roger Désormière, Louis Durey et Charles Kœchlin.
En 1953 elle est nommée professeure au Conservatoire national supérieur de Paris. Elle y enseigne l'analyse de 1969 à 1973.
Elle joue un rôle actif à la Fédération musicale populaire (avec François Vercken), créé en 1932 par la Confédération générale des travailleurs (CGT), pour promouvoir le chant choral.
En 1972-1974 elle est inspectrice des théâtres lyriques nationaux à la Direction de la musique au Ministère de la Culture.
Dans les années 1980, elle se met à l'étude du chinois et du russe, voyage en chine, et participe à de nombreuses rencontres et manifestations en Union soviétique.

J'ai déjà eu l'occasion d'indiquer quel rôle, depuis quelques années, prenait tout d'un coup la femme dans la production musicale. Le prix de Rome de Lili Boulanger fut le point de départ d'une évolution dont on tenterait en vain d'arrêter le cours.
J'attends beaucoup de la femme dans cet art musical pour lequel elle montre d'ordinaire tant de goût.
J'attends surtout qu'elle nous apporte autre chose que de la musique masculine, qu'elle nous fasse la confidence de ce qu'il y a de particulier, de tout à fait féminin dans ses sentiments, qu'elle nous fasse découvrir un monde nouveau d'émotions, celui qui est son domaine propre.
Elsa Barraine est née à Paris, le 13 février 1910, de parents musiciens : son père, violoncelliste à l'Opéra, sa mère, cantatrice. Elsa Barraine, dès le berceau, a entendu de la musique autour d'elle. Toute petite, sa soeur aînée l'emmenait à la classe d'harmonie.
Et l'on remarquait déjà avec quelle facilité elle retenait tout ce qu'elle entendait là. On la mit à l'étude du piano et du solfège, et elle entra au Conservatoire à la fois dans une classe de solfège et dans une classe de piano préparatoire. On voulait faire d'elle une instrumentiste.
Mais on ne l'empêcha point d'entrer à la classe d'harmonie de Jean Gallon. Au bout d'un an, elle obtenait un premier prix.
Alors, elle renonça à la classe de piano supérieure pour celle de fugue et de composition. Caussade et Widor, puis Paul Dukas, furent ses maîtres. Elle travaillait aussi avec Paul Vidal, Fauchet et Büsser.
Et comme tout marchait à souhait, « elle se hasarda », nous dit-elle, à se présenter au concours de Rome. Elle fit bien. Car, en 1928, elle obtint le deuxième second grand prix et en 1929 le premier. Beau couronnement de vaillants efforts. Grande joie qui récompense !
A ce moment, elle me disait que les sujets bibliques et orientaux l'attiraient plus que d'autres, mais que ni le théâtre, ni l'oratorio, ni la mélodie n'avaient ses prédilections. Elle aimait surtout la musique symphonique et la musique de chambre.
Elle partit pour Rome en janvier 1930, sans enthousiasme, l'ingrate ! habiter cette merveilleuse Villa Médicis; se promener à son gré au Pincio; de la terrasse contempler l'harmonieux panorama de la Ville Éternelle;
descendre par l'église de la Trinitédes-Monts et ses marches fleuries vers les petites rues encombrées, d'une bigarrure si amusante, de la vieille Rome ! Tout cela ne lui disait rien. Non. Elle ne songe qu'à son Paris. Vieille habitude...
Quelques jours après son arrivée à la Villa Médicis, elle repart pour la France, pour Paris, où Straram lui joue Harold Harfagar; c'est la première fois qu'elle s'entend à l'orchestre. Quelle joie et quel enseignement !
Puis elle rejoint Rome. Le séjour à la Villa lui paraît très dur. Elle souffre d'être privée des affectueux conseils de son maître Paul Dukas, d'être séparée de sa famille, de son milieu. Elle use de ruses diaboliques pour obtenir des congés et s'enfuir vers les siens.
Cependant, la petite Parisienne s'apprivoise un peu.
Notamment elle fait la découverte des arts plastiques, auxquels elle n'avait jamais prêté la moindre attention, à ce point, — elle avait mauvaise tête, — qu'elle avait toujours refusé d'entrer au Musée du Louvre, sous prétexte que la musique suffisait à tout.
Maintenant les merveilles du Musée des Thermes à Rome, les temples siciliens, les métopes de Sélinonte la passionnent. Mais elle ne s'intéresse qu'à l'art grec ou à ce qui subit directement son influence. L'art proprement romain, la Renaissance italienne, la laissent indifférente.
Elle se met à lire beaucoup et un peu à l'aventure. Pêle-mêle elle dévore mille ouvrages divers, les tragiques grecs, les Mémoires d'Outre-tombe, Ibsen, Labiche, Mæterlinck, Dostoïevsky, Montaigne, des livres chinois, japonais, hindous.
L'obligation de composer les fameux « envois » à l'Institut la ramène à la musique. Elle écrit un petit opéra-comique en un acte, le Roi bossu. Paul Dukas lui avait conseillé cette petite expérience dans le domaine du théâtre.
La pièce fut jouée en 1932 une douzaine de fois. Excellente occasion de passer quatre mois d'hiver à Paris pour les répétitions à l'Opéra-Comique, qu'Elsa Barr aine aurait voulu faire durer indéfiniment.
Dès qu'elle est à Paris, elle se sent plus de goût au travail. Elle écrit alors plusieurs mélodies sur des textes chinois et de Rabindranath Tagore, et aussi trois esquisses symphoniques que Straram inscrit à son programme.
Elle songe à composer de la musique pour Intérieur de Mæterlinck, mais après six mois de travail elle renonce à ce sujet qui comporte trop peu d'action scénique et qui présente trop d'analogies avec Pelléas et avec Ariane.
Alors elle commence une Symphonie, mais sans entrain, en proie à une crise de sécheresse, d'aridité et de nonchalance que provoque en elle l'atmosphère romaine de nouveau retrouvée.
Revenant à la bonne humeur, elle écrit avec meilleure volonté et tout son coeur des Variations pour piano, très réussies.
Et puis, c'est le retour si désiré en France. Grande joie qui inspire l'ardeur à l'ouvrage. Voici successivement : Pogromes pour orchestre, illustration à un poème d'André Spire; un Quintette pour piano et cordes; un Motet pour choeur mixte sur des vers de Clément Marot.
Enfin, premier travail non imposé (quelle délivrance !), une Fantaisie pour piano et orchestre.
Relevons encore dans la production d'Elsa Barraine : Deux Préludes et Fugues pour orgue, la Nuit dans les chemins -du rêve, prélude pour piano; Deux Symphonies, Deux Pièces pour cor et piano, une Fête des Colonies pour l'Exposition de 1937, Ouvrage de dame, quintette pour instruments à vent.
Une petite tête qui porte en elle une ferme volonté. Une nature fine sous ses gestes un peu masculins. Ouvrage de dame, voilà un titre qui me plaît, et à la pensée duquel il siérait qu'une femme compositeur se conformât toujours.

Jean-Marc Warszawski
révision 21 novembre 2005

 


La classe de Paul Dukas en 1929 : de gauche à droite, près du piano :
Pierre Maillard-Verger, Elsa Barraine (bras croisés), Yvonne Desportes, Tony Aubin, Pierre Revel, Georges Favre, Paul Dukas, René Duclos, Georges Hugon, Maurice Duruflé.
À droite, assis : Claude Arrieu, Olivier Messiaen.


Denis Joly, C. Arrieu, E. Barraine, Y. Desportes, P. Dukas

 


Elsa Barraine (1910-1999)
Une compositrice au XXe siècle
Odile Bourin, Pierrette Germain-David, Catherine Massip, Raffi Ourgandjian

Préface de Catherine Massip
Éditeur Delatour France, Sampzon (Ardèche)
ISBN : 978-2-75210-103-7
Description : 137 pages; (21 x 15 cm)
15/11/2010
Ce livre, publié à l'initiative de l'Association Femmes et Musique (et avec le concours de la SACEM), rend hommage, grâce à de nombreux témoignages, à cette exceptionnelle personnalité et présente le catalogue complet de ses œuvres.
Les auteurs Odile Bourin, violoncelliste, Pierrette Germain-David, musicologue, Catherine Massip, directrice du département de la Musique à la Bibliothèque nationale et Raffi Ourgandjan, organiste,
espèrent, par cette approche de l’œuvre, des écrits ainsi que des «faits et dires » d’Elsa Barraine éclairer le rôle qu’elle joue dans l’histoire sociale, culturelle et musicale du XXème siècle.

 

Catalogue partiel des œuvres

Les œuvres d'Elsa Barraine sont éditées chez Costallat, Durand, Salabert, Schott

  • 1928, Joyeuses Pâques, pour chant et piano.
    Valse chantée (au charmantissime illustrissime vénérablissime compositeur Claude Arrieu. Hommage attendri de l'humble et respectueux Elsa Barraine, 11 avril 1928).
    Manuscrit 20798, Bibliothèque nationales de France (musique)
  • 1929, La Vierge guerrière, cantate
  • 1929, 2 Préludes et fugues, orgue
  • 1930, Harald Harfagard, variations symphoniques d'après H. Heine
  • 1930, Symphonie n° 1
  • 1930, Prélude, pour piano
  • 1930, Deuxième prélude et fugue pour orgue. Durand, Paris 1930
  • 1931, Quintette à vents
  • 1931, Il y a quelqu'un d'autre je pense pour chant et piano, sur un texte d'auteur chinois inconnu, traduit pas Marc Logé. Enoch, Paris 1931
  • 1931, Je ne réclamais rien de toi pour chant et piano, sur un poème de Rabinranat Tagore, traduit par André Gide. Enochn Paris 1931
  • 1931, Je suis ici pour te chanter des chansons, pour chant et piano, sur un poème de Rabinranat Tagore, traduit par André Gide. Enochn Paris 1931
  • 1933, Pogromes, pour orchestre
  • 1935, 3 Chansons hébraïques
  • 1936, Crépuscules pour cor d'harmonie avec accompagnement piano. Ch. Gras, Paris 1936
  • 1936, Élégie et ronde pour flûte et accompagnement de piano. Ch. Gras 1936.
  • 1936, Fanfare pour cor d'harmonie avec accompagnement de piano. Ch. Gras, Paris 1936
  • 1936, Hommage à Paul Dukas, pour la piano. Supplément à la « Revue musicale » de mai-juin 1936
  • 1937, 4 Chants juifs
  • 1938, Symphonie n° 2
  • 1938, Dans le sable pour piano et chant sur des paroles de Pierre Camus. Editions sociales internationales, Paris 1938.
  • 1939, Aria pour trompette en ut (ou violon). Editions sociales internationales 1939
  • 1944, Avis sur un poème de Paul Eluard, pour chœur et orchestre. Chant du monde, 1945
  • 1945, Suite astrologique, pour petit orchestre
  • 1945, Variations sur « Le fleuve rouge »
  • 1947, Le mur, ballet de R. de Jouvenel
  • 1947, Musique de film pour « La flûte magique » en collaboration avec Marcel Delannoy
  • 1947, Improvisation pour saxophone (Concours Conservatoire de Paris). Costallat 1947
  • 1948, Musique de scène pour Printemps de la liberté de J. Grémillon
  • 1948, Musique pour le film Pattes blanches de J. Grémillon
  • 1948, Poésie ininterrompue, cantate pour 3 voix solistes et orchestre, sur un poème de Paul Eluard.
  • 1949, L’homme sur terre pour chœur et orchestre sur un poème de Paul Eluard. L'Art musical populaire, Givors 1980
  • 1950, Claudine à l’école, ballet de Colette
  • 1950, La chanson du mal-aimé, ballet d'après Guillaume Apollinaire
  • 1950, Variations, pour percussion et piano
  • 1951, La nativité pour voix solistes, chœur et orchestre, sur un poème de L. Masson
  • 1951, Suite juive, pour violon et piano
  • 1952, Les cinq plaies pour voix solistes choeur et orchestre, sur un poème de M. Manoll
  • 1953, Hommage à Prokofiev, pour orchestre
  • 1954, Fanfares de printemps pour cornet à piston (en si bémol ou en la) et piano. Max Eschig, Paris 1954
  • 1955, 3 ridicules, pour orchestre
  • 1955, Cantate du vendredi saint
  • 1956, Musique pour le film Le sabotier du Val de Loire de Jacques Demy
  • 1958, Les paysans pour 4 voix solistes et orchestre de chambre, sur un poème de A. Frenaud
  • 1958, Andante et Allegro pour saxhorn [Morceau de concours pour le Conservatoire de Paris]
  • 1959, Les jongleurs, pour orchestre
  • 1959, Les tziganes, pour orchestre
  • 1959, Christine
  • 1961, Fantaisie pour clavecin (ou piano). Editions Transatlantiques
  • 1966, Atmosphère, pour hautbois et 10 cordes
  • 1966, Chien de paille pour tuba (ou trombonne ténor, ou trombone basse, ou basson, ou onde Martenot) [Concours du Conservatoire National Spérieur de Paris]
  • 1966-1977, Musique rituelle d'après Le Livre des morts tibétain sur un texte de Bardo Thödo, pour orgue, gongs, xylorimba,
  • 1977, De premier mai en premier mai pour 4 voix mixtes, chœur sur un poème de Paul Eluard. L'Art musical populaire, 1979
  • 1982, La boite de Pandore, 54 exercices et de rythme pour le piano. G. Billaudot, Paris

Filmographie

1959 Ars (court métrage, Jacques Demy)
1956 Le sabotier du Val de Loire (documentaire court métrage, Jacques Demy)
1953 L'amour d'une femme (Jean Grémillon)
1952 Je sème à tout vent (Pierre Kast)
1952 Le coeur d'amour épris du roi René (documentaire court métrage, Jean Aurel)
1949 Pattes blanches (Jean Grémillon)
1948 Au coeur de l'orage (documentaire, Jean-Paul Le Chanois)

Au cœur de l'orage, musique pour le film de Jean-Paul Le Chanois sur le maquis du Vercors (1946).   
A la libération, Jean-Paul Le Chanois (né Jean-Paul Dreyfus, cinéaste et homme de théâtre français né le 25 octobre 1909 à Paris et mort le 8 juillet 1985 à Chamonix) réalise un film (docu-fiction) sur la résistance dans le Vercors. Pour écrire la musique il choisit Elsa Barraine et Tibor Harsányi.
Tourné en 1944, Date de sortie : 30/04/1948. Le scénario est de Maurice van Moppes. 
A l'aide de documents authentiques pour un grand nombre de scènes, reconstituées pour les autres, l'auteur conte l'histoire de ces maquisards qui, en 1944, se réfugièrent dans  le maquis du Vercors, et qui, après avoir été décimés par une expédition allemande aéroportée, tinrent cette même armée en échec, lui interdisant le passage de certains cols, immobilisant des milliers d'hommes qui ne purent ainsi s'opposer au débarquement.
Avec Jean Chevrier (Récitant), Jean Daurand (Récitant), Hubner (Récitant), Kroneger (Récitant), Schiray (Récitant), Christiane Sertilange (Récitante)
Le film complet est disponible sur le site de l'INA :
http://boutique.ina.fr/video/histoire-et-conflits/seconde-guerre-mondiale/AFE00003041/au-coeur-de-l-orage.fr.html

Printemps de la liberté, musique pour la pièce de Jean Grémillon sur la Révolution de 1848 (1948).
Adaptation radiophonique du texte de Jean GREMILLON, projet cinématographique qui ne vit jamais le jour, adapté par l'auteur pour la radio.
Réalisation conjointe de Jean GREMILLON et René WILMET.
Musique d'Elsa BARRAINE, interprétée par l'Orchestre National de France dirigé par Roger DESORMIERES.
Commentaires de Jean GREMILLON.
Interprètes principaux : Fernand LEDOUX, Maurice ESCANDE, Michel BOUQUET et Pierre LARQUEY.
Enregistré le 11 juillet 1949 par la RDF.
L'enregistrement complet est disponible sur le site de l'INA :
http://boutique.ina.fr//audio/PHD89012886/le-printemps-de-la-liberte.fr.html

Musique de chambre et instrumentale
Quintette à vent
Suite juive pour violon et piano
Musique rituelle pour orgue, gongs et xylorimba
Musique rituelle, d’après le Livre des morts tibétain pour grand orgue, xylophone et gongs (1967)
...

Musique chorale
Hymne à la lumière pour soprano et orchestre
Poésie ininterrompue
Cantate du Vendredi Saint
Avis, poème de Paul Eluard pour chœur mixte et orchestre à la mémoire de Georges Dudach (1944)
Poésie ininterrompue, cantate pour trois voix et orchestre pour le poème de Paul Eluard (1948)
L’homme sur terre, poème de Paul Éluard pour chœur mixte et orchestre (1949)
De premier mai en premier mai, poème de Paul Eluard pour chœur a capella (1977)

Bibliographie

  • Joubert Jean-Alain, Elsa Barraine (1910-1999) : incarnation de l’Ariane de Paul Dukas. Dans « Euterpe » (22) février 20113 et (23) septembre 2010. Numérisé dans « Les amis de la musique française ».
  • Odile Bourin, Pierrette Germain-David, Catherine Massip, Raffi Ourgandjian, Elsa Barraine - Une compositrice au XXe siècle. Éditions Delatour, Sampzon, 2010.
  • Raffi Ourgandjian, Elsa Barraine, dans « Compositrices françaises au XXe siècle : portraits de vingt-six compositrices. Association Femmes et musique, Delatour, Sampzon 2007.
  • Women organ composers from the Middle Ages to the present : with performance suggestions for selected works (thèse). Stanford University 1983 [206 p.]
  • Moulder Earline, Jewish themes in Elsa Barraine's second prelude and fugue for organ. Dans «Women of note quarterly : The magazine of historical and contemporary women composers» (vol. 3, n° 3), août 1995, p 22-29
  •  Rediscovering the organ works of Elsa Barraine. Dans «Women of note quarterly : The magazine of historical and contemporary women composers» (vol. 3, n° 2) mai 1995

Documents

  • Paul Landorly : La musique française après Debussy. Galliamard, Paris, 1943 (sixième édition), p. 365-367

Discographie

Barraine Elsa (Jacqueline) 1910-1999
Pseudonymes sous l’Occupation : BONNARD Catherine et TRIOLET pour l’association Gloxinia

Née le 13 février 1910 à Paris (XVIIIe arr.), morte le 20 mars 1999 à Strasbourg; compositeur; animatrice du Front national des musiciens dès l’automne 1941.

Fille de Mathieu Barraine, violoncelliste solo de l’orchestre de l’Opéra de Paris, et de Jeanne Barraine, pianiste, soliste dans les chœurs de la Société des concerts du Conservatoire, Elsa Barraine a fait ses études au Conservatoire national supérieur de musique de Paris où elle fut l’élève de Paul Dukas. Premier grand prix de Rome en 1929 avec sa cantate la Vierge guerrière (Jeanne d’Arc), triptyque saint sur un poème d’Armand Foucher, Elsa Barraine composa sa première symphonie en 1931.
Chef de chant à l’Orchestre national de 1936 à 1940, elle devait connaître une situation professionnelle précaire pendant les années de guerre. De même qu’elle avait adhéré au PCF en réaction aux accords de Munich, Elsa Barraine s’efforça alors de traduire en actes son refus de l’Occupation. Elle date de l’automne 1940 ses premiers contacts en ce sens avec Roger Désormière, chef d’orchestre à l’Opéra-comique, et Louis Durey, compositeur du « Groupe des Six », tous deux piliers de la Fédération musicale populaire et militants du PCF. À ce moment, Louis Durey résidait en fait à Saint-Tropez mais il fut bientôt en rapport avec la « direction des intellectuels communistes » (Georges Politzer et Danielle Casanova) par le canal du chirurgien Raymond Leibovici. À la constitution du comité de Front national des musiciens, en septembre 1941, Elsa Barraine fut chargée - par Roger Désormière ? - d’animer les réunions du groupement clandestin. Elle rendait compte de cette tâche à Georges Dudach, agent de liaison de Georges Politzer, mais il semble qu’elle était également en contact avec René Blech, un ancien de la Maison de la Culture. Toutefois, Elsa Barraine ne relevait pas de l’appareil technique central des comités d’intellectuels que Pierre Maucherat, André Voguet et André Fougeron avaient progressivement compartimenté en six ensembles (enseignants, médecins, écrivains-artistes, techniciens, étudiants et juristes). Les musiciens appartenaient au troisième, lequel se différencia au printemps 1942 en sous-groupes dont un « III. M. ». C’est le compositeur Roland-Manuel qui avait en charge d’organiser l’élaboration et la diffusion des matériaux de propagande - plate-forme du comité (septembre 1941), tracts, Musiciens d’Aujourd’hui (avril 1942). Quoique dépendant de l’appareil communiste, le comité de Front national n’était pas soumis à l’acceptation des conceptions du PCF, en particulier la lutte armée, et ses membres n’étaient liés que par leur plate-forme commune. Celle-ci allait jusqu’à prendre appui sur les objectifs affichés par Vichy pour s’adresser à un milieu pénétré de musique allemande et, par là, potentiellement perméable au discours nazi sur cette musique. En juillet 1942, une lettre-directive précisait en conséquence les terrains et le mode d’intervention d’Elsa Barraine au sein du comité qui comptait alors quinze personnalités. Arrêtée au cours du deuxième semestre 1942, elle fut relâchée sur l’intervention d’un fonctionnaire de la Préfecture de Police de Paris.
Au printemps 1943, elle rédigea avec Roger Désormière et Louis Durey - de retour à Paris -, le manifeste fondateur du « Front national des musiciens », groupement professionnel affilié au Front national (FN), mouvement de Résistance nouvellement constitué (mars 1943). Elle participa ainsi à la réactualisation des mandats qui engageaient les membres du comité : boycott des manifestations nazies et vichystes, contre-propagande (Musiciens d’Aujourd’hui, Pensée Libre), contrebande musicale et défense des créations de « l’esprit français », solidarité avec les victimes de l’oppression, action revendicative et lutte contre le Comité d’organisation des entreprises du spectacle (COES), résistance à la réquisition des musiciens au titre du STO... Louis Durey succéda alors à Elsa Barraine au « secrétariat » du groupement.
En 1944, recherchée par les Allemands et prévenue par sa concierge, elle entra dans la clandestinité et se procura des faux papiers au nom de Catherine Bonnard. Elle usa de cette identité pour signer Avis, créé pour le poème de Paul Éluard : comme le préconisait Musiciens d’Aujourd’hui (février 1944), il s’agissait de « collaborer musicalement à l’œuvre des poètes patriotes et [de] donner des auditions clandestines d’œuvres patriotiques ». Comme la plupart des musiciens du FN, Elsa Barraine participa ainsi aux enregistrements du Studio d’Essai de Pierre Schaeffer destinés à préparer les programmes de la Radio de la Libération.
De l’automne 1944 à 1947, elle travailla à nouveau à l’Orchestre National et dirigea la maison de disques « Chants du Monde ». Avec Roger Désormière, elle contribua à la fondation (fin 1947) de l’Association française des musiciens progressistes dont Louis Durey était le secrétaire général, Charles Koechlin acceptant la présidence d’honneur. Elle participa aussi au « Gloxinia » créé par Roland-Manuel et présidé par Darius Milhaud, « société-farce » qui rassemblait, dès la fin 1944, tous les anciens du Front national des musiciens, à l’exception de Louis Durey, en une amicale dont la longévité (jusqu’en 1968) n’eut rien à envier à celle du très sérieux Comité national des écrivains. Elsa Barraine enseigna au Conservatoire de 1953 à 1974, date à laquelle elle cessa d’être inspecteur des Théâtres lyriques nationaux, fonction qu’elle assurait depuis 1969. Célibataire, elle mourut en 1999 à Strasbourg.
Elle avait obtenu le prix du Portique et la médaille de Chevalier des arts et des lettres

SOURCES : Archives du Musée de la Résistance Nationale : « Monsieur X..., musicien », texte dactylographié [fin 1941]. — « Pour Elsa », lettre-directive non signée et non datée (juillet 1942). — « Front National des intellectuels (rapport reçu le 24 décembre) [1942] », notes manuscrites de Georges Cogniot. — Manifeste, document incomplet [printemps 1943]. — « Musiciens. Mars 1943-mars 1944 », rapport interne. — « Nous refusons de trahir... déclarent les musiciens », L’Université Libre, numéro spécial imprimé, en date de septembre-octobre 1941 (MRN). — Musiciens d’Aujourd’hui, numéros 3 (avril 1942), 4 (octobre 1942), 5 (novembre 1942), 6 (juin 1943), 7 (juillet 1943), 8 (février 1944). — Archives privées (Elsa Barraine).
Témoignages : Elsa Barraine, témoignage recueilli par Daniel Virieux, juillet-août 1998. — Arlette Durey, témoignage recueilli par Nicolas Guillot, avril 1999. — Henri Dutilleux, témoignage recueilli par Guy Krivopissko et Christian Beerman, juillet 1996. — Manuel Rosenthal, témoignage recueilli par Guy Krivopissko et Christian Beerman, juillet 1997. — Henri Barraud, interview in Cahiers d’Histoire de la Radiodiffusion, n° 43, décembre 1994.

Bibliographie : Thierry Adhumeau, « Le « Gloxinia » ou l’époque de l’amitié », Les Cahiers Boëllmann-Gigout, n° 2-3, Paris, décembre 1997-mars 1998. — Henri Dutilleux, Mystères et mémoires des sons, Éditions Belfond, 1993 ; Henri Dutilleux « Pierre Schaeffer », La Lettre du Musicien, janvier 1999. — Pierrette Mari, Henri Dutilleux, Éditions Aug. Zurfluh. SA., Paris, 1988. — Catherine Morgan, « Roland-Manuel nous dit l’action de quatre ans des Musiciens Français », Les Lettres Françaises, n° 21, 16 septembre 1944. — Louis Parrot, L’Intelligence en guerre, Paris, Éditions La Jeune Parque, 1945. — Frédéric Robert, Louis Durey l’aîné des ’Six’Editeurs Français Réunis, 1968. — Pierre Schaeffer, Les antennes de Jéricho, Éditions Stock, 1978. — Jane F. Fulcher, « Style musical et enjeux politiques en France à la veille de la seconde guerre mondiale », Actes de la recherche en sciences sociales, n° 10, décembre 1995.

Daniel Virieux
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