Witold Lutoslawski: Trio for Oboe, Clarinet and Bassoon
Voilà, dès l’intitulé, une irrésistible force attractive qui aura le même magnétisme sur tous les mélomanes amoureux du timbre des instruments à anche, finalement d ‘ailleurs pas tant exploités en formation réduite si on les compare à leurs congénères à cordes. Et à l’écoute de ce trio fait d’un hautbois, d’un basson et d’une clarinette, aucune déception, mieux, le plaisir est, dès les premières notes entièrement, confirmé. La sonorité féline, saillante douce, puissante et vraie, envoûte. Le programme démarre avec Lutoslawski dont la science de l’écriture confirme son statut de compositeur majeur du siècle dernier. Cela continue avec une sonatine de Sandor Veress, une arabesque de Paul Juon et un divertissement d’Erwin Schulhoof qui nous livrent dans la même lignée de superbes pages impressionnistes, gorgées d’un immédiat plaisir déconcertant. Un plaidoyer hédoniste pour nos seigneurs à anche, dont la sonorité porte aussi la ferveur des fêtes populaires d’autrefois. (Jérôme Leclair)
Un quatuor original de trios à vent du 20e siècle, couplé de manière unique sur disque et interprété par un ensemble de musiciens italiens distingués qui ont travaillé avec de nombreux grands orchestres du monde. La combinaison du hautbois, de la clarinette et du basson a attiré plusieurs compositeurs Français dans la première moitié du siècle dernier et a inspiré des divertissements spirituels et élégants d’Ibert, Francaix et Poulenc. Mais le caractère du trio séduisait les compositeurs plus éloignés, comme le montre cet album, et cet attrait ne se limitait en aucun cas à la « musique légère », même si toute la musique de cet album – de Suisse, de Pologne, de République tchèque et de Hongrie – partage une légèreté et une légèreté de texture. Les compositeurs d’Europe de l’Est – Lutoslawski, Schulhoff et Veress – ont tous souffert sous des régimes totalitaires, et Schulhoff est mort aux mains des nazis, mais leurs histoires douloureuses ne jettent pas une ombre sur les morceaux de cet album. En fait, les origines du Trio de Lutoslawski se trouvent précisément dans les exercices de contrepoint qu’il a réalisés à l’hiver 1944-5, lorsqu’il avait été contraint de fuir Varsovie, avec sa mère, à la suite des conséquences de l’insurrection de Varsovie. Le Trio est une œuvre expérimentale décalée et agitée, comme l’expliquera plus tard le compositeur : « J’essayais de trouver mes repères dans le monde de la tonalité libre. [...] J’ai choisi les instruments à vent parce que mes recherches sur la hauteur, le rythme et l’organisation du son pouvaient être menées de la manière la plus simple avec leur aide. » Le trio à vent en tant que laboratoire a également séduit Sandor Veress, qui a trouvé une synthèse très personnelle de ses propres recherches sur la chanson folklorique hongroise avec les théories à 12 tons de la deuxième école viennoise. Les mouvements extérieurs de sa Sonatine abondent dans l’humour fou de son compatriote Ligeti, tandis que l’Andante central introduit un thème mémorable au basson. Divertissement de Schulhoff est naturellement l’œuvre la plus Français de l’album, un ensemble de sept croquis compacts de personnages, dont un Charleston (n ° 4) et « Florida » (n ° 6). Connu dans certains milieux comme le « Brahms russe » de son pays natal, Paul Juon est la figure la moins connue ici, mais pas la moins accomplie, et son Arabesque est une structure substantielle en quatre mouvements lancée dans un style raffiné par le mouvement Commodo avec des échos de Nielsen à son apogée, suivi d’un Larghetto enflammé, un menuet qui parodie les mœurs du 18ème siècle, et une finale fringante avec une parenthèse plus réfléchie.