Garden Scene
Analekta AN 2 9931

Joel Quarrington, contrebasse
Andrew Burashko, piano
15 septembre 2009
  1 Erich Wolfgang Korngold (1897 - 1957) : Garden Scene, Tiré de “Much Ado About Nothing” op. 11, Quatre pieces pour violon et piano (1920) 5:22
  2 Giovanni Bottesini (1821 - 1889) : Élégie en ré majeur 4:40
  3 Henri Casadesus (1879 - 1947) : Concerto en sol mineur (dans le style de Johann Christian Bach, 1735-1782)
I. Allegro molto ma maestoso
4:02
  4 II. Adagio molto espressivo 5:48
  5 III. Allegro molto energico 3:50
  6 Reinhold Glière (1875 - 1956) : Quatre pièces pour contrebasse et piano
Präludium, Op.32. No.1
3:44
  7 Scherzo, Op.32, No. 2 4:23
  8 Intermezzo, Op. 9, No.1 3:22
  9 Tarantella, Op.9, No.2 3:44
10 Mieczyslaw Weinberg (1919 - 1996) : Sonate pour contrebasse solo, opus 108 (1971)
I. Adagio
3:39
11 II. Allegretto 2:24
12 III. Moderato 2:24
13 IV. Allegretto 1:28
14 V. Lento 3:53
15 VI. Allegro Molto 4:03

Korngold : Garden Scene

Erich Wolfgang Korngold (1897-1957), l’un des enfants prodiges les plus doués du monde de la musique, a souvent été comparé à Mozart. Né le 29 mai 1897, dans la ville devenue aujourd’hui Brno, en République tchèque, il déménage avec sa famille à Vienne à l’âge de quatre ans. Plusieurs de ses œuvres d’adolescent ont été défendues par les plus grands musiciens de l’époque, dont Mahler, Puccini, Richard Strauss, Zemlinsky, Schnabel, Nikisch, Weingartner et Bruno Walter. Son opéra le plus connu, Die Tote Stadt, remonte à 1920, tout comme sa musique de scène écrite pour une production de Much Ado about Nothing (Beaucoup de bruit pour rien) de Shakespeare. La Scène du jardin (Garden Scene) reprise sur cet enregistrement est tirée d’un arrangement pour violon et piano de cette page orchestrale.
En 1934, il se met à la composition de trames sonores de films hollywoodiens. On se souviendra tout particulièrement de celles, récompensées par un Oscar, pour les films débordants d’esbroufe d’Errol Flynn, dont The Adventures of Robin Hood, Captain Blood et The Sea Hawk.
Après la guerre, Korngold tourne la page sur sa vie à Hollywood, opte pour un retour aux sources et compose de nouveau pour le concert. Le Concerto pour violoncelle opus 37 et le Concerto pour violon en ré majeur (créé par Jascha Heifetz en 1947) s’inscrivent comme des œuvres importantes de cette période, son magnifique Concerto pour violon demeurant aujourd’hui l’un des plus aimés.
Korngold retrouve l’Europe en 1949, mais malheureusement, sa musique n’y est pas reçue avec les égards qu’elle mérite. Découragé, il retourne aux États-Unis et y vivra dans l’oubli jusqu’à sa mort, en 1957, à l’âge de 60 ans. Dans les décennies qui ont suivi son décès, Korngold est devenu de plus en plus populaire et enfin apprécié à son juste titre partout dans le monde.

Bottesini : Élégie en ré

Contrebassiste virtuose, chef d’orchestre et compositeur italien, Giovanni Bottesini (1821-1889) a choisi de se consacrer à la contrebasse un peu par hasard. En effet, lors de son admission au Conservatoire de Milan en 1835, il ne restait plus que deux bourses, dont l’autre en basson. Après avoir complété ses études, il a participé à nombre de tournées et ensorcelait le public avec sa sonorité riche et son style bel canto. La façon acrobatique dont il maniait la touche de l’instrument lui vaudra bientôt le surnom de « Paganini de la contrebasse ».
L’utilisation par Bottesini des aigus de l’instrument était révolutionnaire à l’époque et a toujours enchanté les publics, partout où il allait. Un critique s’est même exclamé : « Comme il nous a déconcertés en jouant toutes sortes de mélodies avec ses harmoniques flûtées, comme si des centaines de rossignols étaient emprisonnés dans sa contrebasse! »
Pendant plusieurs années, il a collaboré avec la Compagnie d’opéra italienne de La Havane, qui effectuait de nombreuses tournées aux États-Unis. Une soirée typique comprenait invariablement l’interprétation de fantaisies opératiques totalement renversantes par Signor Bottesini, ponctuées d’applaudissements frénétiques et d’évanouissements féminins!
À partir de 1870, il se consacra de plus en plus à la composition, produisant des opéras, des chants, des pièces orchestrales et nombre de pages pour la contrebasse. Son Élégie en ré reste l’une de ses œuvres les plus populaires.

Casadesus : Concerto pour alto en do mineur, dans le style de J. C. Bach

Même si le Concerto pour alto en do mineur (transposé ici en sol mineur) de J. C. Bach (1735-1782) est connu et aimé, il a en réalité été composé par Henri Casadesus (1879-1947), altiste doué et compositeur convaincant. Héritier d’une grande famille musicale, il devait être reconnu (avec son frère Marius) pour la façon dont il créait des partitions « redécouvertes » des géants du XVIIIe siècle tels Mozart, C.P.E. Bach et Handel. En fait, les frères Casadesus avaient commis toutes ces œuvres, notamment le célèbre Concerto pour violon « Adelaïde » attribué à Mozart. Peu importe au fond, la musique reste plaisante et le Concerto pour alto dans le style de J. C. Bach d’Henri Casadesus continue de charmer les mélomanes, particulièrement grâce à son superbe mouvement lent.

Glière : Quatre pièces pour contrebasse et piano

En 1945, on a salué Reinhold Glière (1875-1961) en tant que « père des compositeurs soviétiques », non seulement pour son génie de compositeur, mais aussi pour ses exploits de pédagogue, des compositeurs aussi brillants que Prokofiev, Khachaturian et Mayakovski ayant étudié avec lui. Il dédia à son ami Serge Koussevitzky, contrebassiste et chef d’orchestre, certaines de ses pages orchestrales ainsi que les œuvres qui se retrouvent sur cet enregistrement, dont l’Intermezzo et tarentelle opus 9 (daté de 1902) et le Prélude et scherzo opus 32 (daté de 1908).
En 1927, il écrivit la musique du ballet Le Pavot rouge (titre révisé ultérieurement en La Fleur rouge par Glière, pour éviter les allusions à). Ce ballet et ses concertos pour soprano, harpe et cor restent ses compositions les plus célèbres.

Weinberg : Sonate pour contrebasse seule

Né à Varsovie, Mieczyslaw Weinberg – ou Moishei Vainberg – (1919-1996) demeure l’un des grands compositeurs du XXe siècle et ce, même si, jusqu’à tout récemment, il est demeuré méconnu et négligé. Weinberg a composé 26 symphonies, 7 concertos, 17 quatuors à cordes, 28 sonates pour divers instruments, 7 opéras, plusieurs ballets, de la musique pour 65 films et de nombreuses autres œuvres, dont un Requiem.
Victime des tyrannies nazies et soviétiques, toute sa famille fut brûlée vivante en 1941. En tant que réfugié, Weinberg a d’abord fui vers Minsk puis Tachkent. En 1943, il transmet sa partition de sa Première Symphonie à Chostakovitch, si impressionné par sa qualité qu’il entreprend les démarches pour que Weinberg soit invité officiellement à Moscou, ville qu’il habitera jusqu’à sa mort. Chostakovitch et lui devinrent rapidement amis et collègues.
La vie de Weinberg a été rendue particulièrement difficile par la campagne antisémite de Staline, qui n’hésita pas à l’arrêter en 1953 sous l’inculpation absurde d’avoir fomenté la mise sur pied d’une république juive en Crimée. Fort heureusement, le décès de Staline devait lui permettre d’être relâché.
La musique de Weinberg ressemble en beaucoup de points à celle de Chostakovitch et il acceptait la comparaison sans honte, en affirmant : « Je suis un élève de Chostakovitch. Même si je n’ai jamais pris de leçons de lui, je me considère comme son élève, sa chair et son sang. » De même, Chostakovitch considérait Weinberg comme l’un des compositeurs les plus remarquables de son époque.
La Sonate pour contrebasse seule entendue ici est basée sur une copie du manuscrit, éditée par le grand contrebassiste virtuose Rodion Azarkhin.

© Joel Quarrington
Traduction: Lucie Renaud