Acteurs
Aleksandra Śląska, Anna Ciepielewska, Jan Kreczmar, Marek Walczewski,
Maria Kościałkowska, Irena Malkiewicz, Janusz Bylczyński, Anna Jaraczówna,
Krzesisława Dubielówna, Anna Gołębiowska, Barbara Horawianka
Résumé
Liza subit un choc, quand, lors d’une croisière en compagnie de son
mari, elle croit reconnaître parmi les passagers une jeune femme, Marta,
ex-détenue du camp d’Auschwitz où elle était surveillante SS. Liza, dont
le mari ignore cette partie de sa vie, se souvient de son passé
terrifiant. Ce sont d’abord des fragments en vrac qu’elle arrange afin
de construire un récit à l’intention de son mari, et dans le but de se
justifier, mais peu à peu la véritable histoire se reconstitue.
L'ultime œuvre de Munk, film choc qui, vingt ans avant le controversé "Portier
de nuit", mettait en lumière l'ambivalence des êtres et le traumatisme
des camps.
Un grand classique. Prix de la Critique Internationale et Mention spéciale du jury en hommage au réalisateur, au Festival de Cannes 1964.
Directed by Andrzej Munk | (screenplay) |
Witold Lesiewicz | (for completion) |
Zofia Posmysz | (novel and screenplay) |
Cast (in credits order) - verified as complete | |
Aleksandra Slaska | Liza |
Anna Ciepielewska | Marta |
Jan Kreczmar | Walter |
Marek Walczewski | Tadeusz |
Irena Malkiewicz | Oberaufseherin Madel |
Barbara Horawianka | Nurse |
Maria Koscialkowska | Guard Inga Weniger |
Anna Jaraczówna | Capo |
Leon Pietraszkiewicz | Lagerkommandant Grabner |
Janusz Bylczynski | Capo |
Andrzej Krasicki | Commission Member |
Zdzislaw Szymborski | SS-Man |
Kazimierz Rudzki | Commission Member |
Anna Golebiowska | Female Prisoner |
Krzesislawa Dubielówna | |
Izabella Olszewska | |
Wanda Swaryczewska | |
Barbara Walkówna | Capo |
Rest of cast listed alphabetically | |
Elzbieta Czyzewska | Female Prisoner (uncredited) |
Tadeusz Lomnicki | Narrator (voice) (uncredited) |
Stanislaw Niwinski | Prisoner (uncredited) |
Adam Perzyk | Prisoner (uncredited) |
Sylwester Przedwojewski | Guard (uncredited) |
Boguslaw Sochnacki | German Soldier (uncredited) |
Maria Wachowiak | Prisoner (uncredited) |
Music Department : Tadeusz Baird / Stanislaw Wislocki (conductor) / Igor Ivanov (violin solo, uncredited) | |
Technical crew | |
Cinematography by: Krzysztof Winiewicz | |
Film Editing by: Zofia Dwornik | |
Production Design by: Tadeusz Wybult | |
Art Direction by: Romuald Korczak | |
Set Decoration by : Leonard Mokicz | |
Makeup Department : Mieczyslaw Posmiechowicz / Teresa Tomaszewska | |
Production Management : Wieslaw Grzelczak | |
Assistant production manager : lhelm Hollender | |
Production manager : Barbara Pec-Slesickad | |
Assistant production manager | |
Second Unit Director or Assistant Director : Andrzej Brzozowski /Anna Dyrka | |
Sound Department : Jerzy Szawlowski | |
Camera and Electrical Department : Tadeusz Jakuczyn (assistant camera) / Stanislaw Matuszewski (lighting technician) / Wieslaw Rutowicz (camera operator) | |
Other crew | |
Tamara Gawrys, production secretary | |
Wlodzimierz Kaminski, completion team member (as W. Kaminski) | |
Jerzy Piotrowski, Maria Rutkowska, Wladyslaw Tomaszewski, Henryk Wasilewski, completion team member |
Critiques
" Voici enfin à Paris (...) ce film qui fut l'un des grands
événements des Festivals de cet été. Ce n'est pas sans mélancolie
que nous nous réjouissons de cette « révélation ». Bien que Munk
n'ait eu que 40 ans à sa mort, il laisse derrière lui une œuvre si
importante qu'il faudra bien que l'histoire du cinéma lui restitue
cette place qu'on n'a pas su lui accorder de son vivant : son génie
se refusait à entrer dans les cadres tout faits, et était vraiment
trop incommode à domestiquer (...)
Dans La Passagère, Munk analyse la place et la responsabilité de
l'individu dans un régime qui, basé sur le crime, se propose comme
but, plus ou moins éloigné, l'extermination d'autres peuples et dans
lequel un seul homme s'attribue un rang surhumain.
Même un tel régime groupe à l'origine des individus qui, chacun pris
à part, est un être humain normal, simple. Cet individu — l'héroïne
du film — se trouve mêlé à des évènements à l'égard desquels il
devrait prendre une attitude nettement négative.
A travers l'exemple de cette jeune pro-nazie, qui s'est laissée
contaminer involontairement par le national socialisme, il voulait
poser la question suivante, et y répondre : où commence la
responsabilité de l'individu vis-à-vis de l'histoire, du régime que
cet individu n'a pas contribué à créer, qu'il a trouvé déjà établi
; où est la limite entre la
loyauté envers le régime, et le crime individuel dont il faut
répondre — et de quelle façon — individuellement.
Munk voulait analyser la façon d'agir d'un régime qui sacrifie té
bien et le bonheur de l'individu à l'intérêt de l'Etat, et qui
cherche à s'assurer une durée centenaire par la force, la
contrainte, l'extermination en masse, au nom d'un idéal débile,
pseudo-philosophique.
Munk a préparé le film avec beaucoup de soin. Il à réuni la matière,
les documents, il s'est familiarisé avec des sources peu
accessibles, ne quittant pas les mémoires du fameux Rudolf Hœss,
ancien chef du camp d'Auschwitz. Il se rendait compte de la
difficulté à traduire sur le plan artistique un tel problème
politique, philosophique, moral
; il était conscient de la responsabilité qu'il prenait. Il a
travaillé à ce scénario pendant plusieurs mois, n'en a jamais été
content.
Le film devait avoir un mécanisme dramatique très compliqué, joué
sur deux plans essentiels entremêlés. L'action présente se déroulait
sur un transatlantique (d'où le titre) ; l'autre action,
rétrospective, se situait au camp d'Auschwitz où l'héroïne était
alors surveillante ; elle était fragmentée en séquences qui,
relatant des évènements de
1943, ne se recomposaient clairement en un tout qu'à la fin du
film.
Ainsi, en élaborant la synopsis, on a décidé d'utiliser le format
panoramique pour les scènes du passé, et de revenir au format
normal pour les séquences actuelles tournées sur le transatlantique.
Parfois, on a utilisé des procédés de mise en scène peu courants :
on a bouleversé la chronologie des événements, renoncé à conserver
la
continuité de l'action et du temps, surtout dans la partie
rétrospective.
La richesse et l'intensité de l'image et du son croissent dans une
progression à laquelle correspond l'évocation subjective que fait
l'héroïne et qui s'insinue progressivement dans la relation
objective, presque documentaire..."
Jean Delmas, 1964, Jeune cinéma
" ...L'œuvre de Munk est une œuvre où la
réussite, l'échec ont moins d'importance que la recherche.
Les Hommes de la Croix Bleue est
excellent, et, pour cette raison, ne mène à rien. De
la veine à revendre est mauvais, et, pour cette
raison, mène au pur chef-d'œuvre, à La Passagère. Munk a atteint le
fond, le tréfonds de son échec, et a pu ainsi le transformer en
réussite absolue. Il s'en fallait d'ailleurs de très peu, d'une
ordonnance cohérente des éléments, que ses films les plus ratés ne
soient des chefs-d'œuvre.
Au lendemain de la déconfiture cannoise de De la
veine à revendre, Munk, découragé, se tourna vers le
théâtre, adapta Bernard Shaw, un parent spirituel, filma pour la
Télévision une première Passagère, où les rapports de l'Allemande et
de son mari sont explicités dramatiquement et laborieusement jusqu'à
ce qu'ils décident de quitter le
bateau et sa passagère, qui descendra avant...
Conscient de l'infériorité de ses schémas par rapport à son réalisme
antérieur, Munk voulait revenir au documentaire : La
Passagère est d'abord un documentaire, sur Auschwitz,
sur ses habitants, sur ceux qui les filment. On nous dit au début
que Witold Lesiewicz — Les Etoiles doivent briller,
mais aussi hélas L'Evadé de l'enfer (Dezerter,
1958) — a monté les scènes du Passé tournées par Munk en Scope et
des images fixes en 1,33 de la partie moderne, très partiellement
tournée par Munk avant sa mort brutale le 20-9-1961.
Sur le bateau, l'ex-S.S. Liza — retour d'Amérique avec son mari —
lui dit qu'elle croit reconnaître sur le pont la déportée Marta, lui
raconte comment elle l'a sauvée d'Auschwitz. Ensuite elle se
confesse à elle-même une vérité un peu moins jolie, mais encore
démentie par la cruelle vérité des images : elle a fait tuer Marta.
On pourrait raconter La Passagère — sans doute le film le plus
purement sadiste — comme étant l'histoire du sadisme moral de Liza,
qui veut posséder Marta, échoue, et le transforme en sadisme
physique ; Marta n'en triomphera que mieux, hantant encore la
conscience de Liza quinze ans après.
Déçu par les plans du Présent — simplement utilitaires comme dans Un
homme sur la voie et le téléfilm, avec lequel ce cinéaste du
changement ne voyait pas assez de différences — Munk était obligé de
repenser totalement la construction de son film, comme pour Eroica.
C'était une chose normale pour ce chercheur, et on peut dire que
La Passagère était achevée au jour de
sa mort puisque Munk avait à son avantage, en plus d'avoir réussi le
Passé, d'avoir réussi à reconnaître l'échec du Présent — inévitable
dans la mesure où Auschwitz est un problème éternel et insoluble,
sinon par diverses solutions plus ou moins individuelles plus ou
moins accidentelles entre
lesquelles il aurait dû trancher, la pluralité des présents ne
pouvant guère s'ajouter à la pluralité des passés.
De plus, sa propre mort était inscrite dans le projet de l'œuvre.
Non point qu'il se soit tué volontairement en auto sur la route de
Lowicz comme à quelques hectomètres de là l'homme sur la voie.
Mais La Passagère est une
accumulation de structures — points de vue et formes esthétiques
diverses mélangés — dans laquelle le point de vue et la forme
esthétique supplémentaires rendus nécessaires par sa mort s'insèrent
fort bien, et donnent une justification réaliste à l'arbitraire des
fictions évoquées.
Marta et Liza n'existent pas dans la vie, du moins telles qu'elles
sont ici, mais seulement dans l'esprit, dans le film de Munk. Les
montrer dans la réalité de la vie — comme Munk vivant l'aurait fait,
comme il l'avait fait pour ses personnages précédents — eût été
mentir ; les montrer dans la réalité du film de Munk, et montrer
toute la vérité
existant autour du film, a permis de faire l'un des films les plus
vrais qui soient (...)
Les simples documentaires, eux, sont moins vrais, car ils ne
présentent que la vérité, et non pas la critique du mensonge. Cette
esthétique de structuration n'apparaît plus comme un jeu de
l'esprit. La vie la rend réelle.
Ce mort s'ajoute à la mort qui est un des personnages principaux du
film. Et, à revoir le premier plan — Munk dont on annonce la mort —
nous sommes encore plus émus : tout comme la vie, ce chef-d'œuvre
apparaît comme un météore.
Nous comprenons que nous ne verrons plus d'autres chefs-d'œuvre de
Munk, et nous en souffrons, bien que nous comprenions aussi que
c'est parce que nous ne pourrons plus voir d'autres chefs-d'œuvre de
Munk que La Passagère est un
chef-d'œuvre, que c'est parce que nous avons déjà vu ce plan du
cinéaste mort que nous regrettons
qu'il soit mort.
« Il se peut que La Passagère dans sa
version intégrale eût été deux fois moins réussi, il se peut aussi
le contraire», avance Gilbert Salachas dans « Télérama ». C'est là
une utopie, car la mort de Munk ajoute au film des éléments
supplémentaires d'une qualité prodigieuse qui sont les seuls du film
à ne pouvoir se retrouver, même partiellement, dans aucun autre. Et
il faut féliciter Lesiewicz et Woroszlyski d'avoir su le comprendre.
De nombreux autres avaient échoué : Wajda, Mary Seton pour
Eisenstein, Preminger pour Lubitsch (...)
Chaque fait est restitué dans des conditions proches de celles de
son déroulement, sans dramaturgie aucune. Le spectateur passif se
fonde sur le commentaire de Liza et subit les images, absolument
différentes, sans en être choqué. C'est que Liza, elle aussi, voyait
ce que nous voyons tout en pensant ce qu'elle dit.
Cette inconscience a été, est celle de la majorité des « bourreaux
». En la mettant en évidence, Munk nous oblige à participer au film,
à devenir actif — et la structure postiche nous y invite encore
plus. Il s'oppose en cela aux industriels du film (dont les familles
furent pourtant les premières touchées par le nazisme), à leur
dangereuse
conception du cinéma, selon laquelle le spectateur doit recevoir le
spectacle sans faire d'efforts ni devoir réfléchir. C'est en
recevant le spectacle du monde sans faire d'efforts ni réfléchir,
suivant l'invite d'une civilisation qui nie la culture, que des gens
comme Liza sont devenus des « bourreaux ». Personne ne les avait
entraînés à reconnaître
les valeurs de la civilisation et leurs négations dans la vie
concrète, toujours inattendue.
Chaque image a au moins une signification, que le commentaire ne
peut nous donner, ou qu'il nous donne fausse. Nous nous promenons en
toute liberté dans cette réalité, exprimée parfois au cours de lents
et longs mouvements d'appareil.
Ils n'ont pas la valeur incantatoire de ceux de Resnais dans
Nuit et brouillard (1955), mais uns valeur
réaliste : le regard passe souvent sans s'arrêter sur des détails
essentiels. La discrétion de Resnais était une discrétion que l'on
remarque. Ici, la discrétion reste discrète. De la chambre à gaz
nous ne voyons que le tour, tout comme les
Allemands. Ceux qui ont vu l'intérieur ne sont plus là pour en
parler. Il eût donc été invraisemblable de le montrer.
De même la constance de la beauté plastique de ce film — cher — de
technicien protège mieux l'objectivité. Elle lui donne toutes ses
chances, que l'expressionnisme et la laideur lui retirent. La
laideur coïncide avec le schème, la beauté avec la vérité, ici comme
dans Les Hommes de la Croix Bleue..."
" J'avoue que la première vision de ce beau film m'a laissé
tellement pantois, tellement bouleversé que je suis encore incapable
d'en faire une critique de sang-froid. Il est des œuvres que l'on
reçoit ainsi de plein front, dans l’estomac et qui vous laissent
désemparé et tremblant.
On a tout dit sur l’horreur des camps de la mort et sur l'atrocité
des méthodes concentrationnaires. Et pourtant, chaque évocation
nouvelle de cette monstrueuse, de cette affolante réalité nous
procure cette même sensation de honte pour l'humanité.
Ce que nous montre le film de Munk ressemble d'abord à un
documentaire. Le grain de l’image et l’éclairage blafard ou
grisâtre des premières séquences animées évoquent les documents
d’archives. Les détails les plus ignobles y sont rapportés, mais
sans aucune complaisance, sans le moindre faux pas. Munk se garde de
la reconstitution trop lyrique ou trop spectaculaire. Nous voyons
les faits et les gestes dans leur sécheresse inhumaine : le défilé
impeccable des chiens policiers, l’absurde orphéon qui accueillie
en musique le retour ou le départ des prisonniers, la course des
femmes nues dont certaines seront sélectionnées pour passer dans la
chambre à gaz.
Nous voyons aussi la cohorte des condamnés qui s’engouffrent
sagement dans le tunnel d'où iils ne sortiront plus jamais, et les
scènes quotidiennes, abominables, routinières. Une femme se débat
dans la boue, rossée par une surveillante implacable et sauvage.
Cela c'est la toile de fond, l’atmosphère. Dans ce contexte,
ressuscité avec un tact inouï (on pense, bien entendu, à la ferveur
contenue de Resnais et Cayrol dans
Nuit et brouillard), deux personnages féminins se
détachent : Lisa le bourreau et Martha la victime. Le récit prend
alors une dimension sublime, Martha a presque tout perdu et peut
pendre plus encore ; elle est physiquement brisée, à la merci des
tortionnaires. Il lui reste son âme. Et c'est son âme que convoite
Lisa, diaboliquement (le mot n’est pas exagéré). L'enjeu est
terrible et la lutte grandiose. C'est dans ce rapport de forces qui
met en présence des valeurs essentielles, que réside toute lia
beauté tragique, toute la noblesse de La Passagère. Plus qu'un
spectacle, plus qu'un récit émouvant, c'est une méditation.
L'effroi nous étreint en même temps que le vertige. Et nous pouvons
être reconnaissants au très regretté Andrezj Munk d’avoir laissé un
testament aussi extraordinaire.
Il y aurait beaucoup d’autres choses à dire et sur le style de la
réalisation (d'une rigueur exemplaire) et sur tes rapports de ce
film avec tout un courant moderne d'expression. On ne manquera pas
de comparer La Passagère à
Hiroshima mon amour. Effectivement la référence
s'impose dans la mesure où les films s’opposent. Chez
Resnais et Duras le passé, sollicité, s’estompe petit à petit,
alors que pour Munk au contraire c'est le présent qui est neutre et
le souvenir vivant, angoissant, indélébile.
Une question a été posée : le film aurait-il été aussi réussi s’il
avait été terminé par Munk. N’aurait il pas perdu quelque chose de
son ambiguïté ? Les scènes du présent, évoquées par des images
fixes, ne donnent-elles pas plus de puissance expressive à la
dialectique de cette méditation ? J'avoue considérer cet aspect de
la question comme un faux problème. On ne fait pas de la critique
"avec des si". Et s’il se peut que La Passagère dans sa version
intégrale eût été deux fois moins réussie, il se peut aussi le
contraire.
Telle qu’elle est, cette œuvre extrêmement dure est à mon avis l’une
des plus prodigieuses du cinéma contemporain. Et par son ton et par
son style et par sa portée. Une œuvre inoubliable et inépuisable."
" Film pur et dur, sans concessions et sans complaisances.
Tout en dénonçant l'horreur Munk exalte le courage et l'amour. Ce
qui permet à la victime de survivre c'est finalement une qualité
morale dont sa résistance physique n'est que le reflet. Et dans le
cœur du bourreau tout n'est pas d'une égale noirceur... Pour nous
décrire la vie du camp, Munk ne hausse jamais le ton. L'enfer prend
ici un aspect inéluctable, quotidien, presque routinier. Routine que
ces appels en pleine nuit, que ces femmes nues courant dans l'ombre
glacée ; routine que ces soldats s'affairant autour des chambres à
gaz ; routine que ces cadavres, que cette terreur et cette
ignominie...
Ce sont les scènes d'Auschwitz que Munk avait tournées avant sa
mort. Le reste — les séquences du bateau — ne sont qu'évoquées. Mais
ce déséquilibre rejoint la vérité du film. Dans la Passagère c'est
le présent qui est le temps des fantômes ; seul compte le passé."